Selon une enquête portant sur l’utilisation des médias au Québec, les jeunes préfèrent s’informer via l’Internet, mais six Québécois sur dix n’utilisent aucun média moderne sur une base régulière à cette fin.
Une enquête réalisée par le consultant Michel Lemieux pour le Centre d’études sur les médias de l’Université Laval, en collaboration avec le Consortium canadien de recherche sur les médias, révèle que 34,1 % du temps consacré à l’information par les personnes sondées est accordé à la télévision. Les quotidiens obtiennent 22,7 % du temps d’information, alors que la radio en obtient 18,3 %. Viennent ensuite les hebdomadaires (9,4 %) et les magazines (7,8 %).
Le recours à l’Internet en général pour l’information arrive à l’avant-dernier rang, avec une part de 6,7 % dans l’information totale, alors que l’information obtenue sur le téléphone cellulaire ou la console portable Blackberry n’obtient qu’une part de 0,1 %.
La distinction des médias électroniques et des médias traditionnels démontre, dans la catégorie des quotidiens, que ceux qui sont produits sur Internet obtiennent une part de 4,4 %, soit la même proportion que les quotidiens gratuits qui sont imprimés sur du papier. Les quotidiens payants obtiennent une part majoritaire dans cette catégorie, avec une part de 13,3 %. Ces données démontrent que les journaux quotidiens auraient subi les impacts les plus significatifs de l’arrivée des médias concurrents sur le marché au cours de la dernière décennie.
La radio diffusée sur Internet obtient une part de 1,3 %, alors que la radio traditionnelle domine la catégorie avec une part de 17 %. Quant à la télévision, celle qui est diffusée sur Internet n’obtient qu’une part de 0,1 %, contre 34 % pour la télévision traditionnelle.
L’enquête suggère également une corrélation des facteurs de scolarité ou d’âge et l’utilisation de certains des moyens d’information. Les quotidiens, la radio et l’Internet obtiennent une place plus privilégiée dans la consommation d’information lorsqu’une personne est plus scolarisée, alors que la télévision est davantage utilisée par les personnes moins scolarisées.
Quant à l’âge, l’enquête indique que la jeunesse préfère l’Internet et les personnes plus âgées les quotidiens, mais que ce facteur ne crée pas de telles tendances sur l’écoute de la radio et de la télévision.
Surtout, l’enquête révèle que six Québécois sur dix n’utilisent aucun média moderne sur une base régulière pour s’informer, et que le temps passé à s’informer au moyen des nouveaux médias ne représente que 12,6 % du temps total consacré à l’information. L’utilisation de l’Internet pour l’obtention d’information, toutefois, serait en croissance.
Changements graduels
Florian Sauvageau, le directeur du Centre d’études sur les médias de l’Université Laval, estime que la proportion de quatre utilisateurs sur dix qui utilisent les médias modernes « n’est pas si mal », si l’on considère l’émergence relativement récente de l’Internet dans le paysage médiatique.
« Les changements ne surviennent pas du jour au lendemain, souligne M. Sauvageau. Bien des gens sont passifs et préfèrent obtenir leur information en regardant la télévision parce qu’ils y sont habitués, mais cela ne veut pas dire qu’Internet ne sera pas [un média] dominant un jour. »
À propos de l’impact des nouvelles obtenues sur Internet sur les quotidiens, M. Sauvageau fait était d’une mouvance à l’échelle mondiale où les journaux traditionnels ressentent les impacts de la concurrence des médias gratuits.
« Les jeunes qui sont habitués à ne pas payer pour obtenir de l’information sur le Web ne sont pas prêts à payer un dollar pour un journal. Les personnes plus âgées ont une habitude du [journal] quotidien, et quand cela fait vingt ans qu’on lit La Presse ou Le Devoir, on ne les abandonne pas du jour au lendemain! C’est une question de génération et d’habitude », commente-t-il.
« Le grand patron du New York Times a dit qu’il n’a pas de craintes pour l’avenir du [journal], qu’il sera encore là dans cinq ans et dans dix ans, mais il ajoute qu’il ne sait pas “où” il sera, sur papier ou sur l’Internet. C’est certain qu’un jour que Cyberpresse aura plus de lecteurs que La Presse sur papier, mais cela n’arrivera pas l’année prochaine. On ne sait pas quand cela arrivera, et ceux qui essaient de le dire, il ne faut pas les croire », a ajouté M. Sauvageau, en précisant qu’une pareille enquête devrait être réalisée tous les deux ans.
Types de consommateurs
Les producteurs de l’enquête, au terme d’une combinaison des informations portant sur l’intensité de la consommation d’information et le niveau d’utilisation des nouveaux médias, ont ainsi établi quatre types de consommateurs d’information.
Il s’agit des « accrocs modernes », qui consomment beaucoup d’information et utilisent beaucoup les médias modernes, des « modernes peu informés », qui recueillent moins d’information, mais utilisent beaucoup les médias modernes, des « informés traditionnels », qui s’intéressent beaucoup à l’information, mais préfèrent les médias conventionnels, et des « hors circuit », qui consomment peu d’information et consultent peu de nouveaux médias.
L’enquête a été réalisée à la fin de l’année 2006 et au début de l’année 2007 auprès de 485 francophones de Laval, Montréal, Québec et Rivière-du-Loup. La marge d’erreur est de 4,45 %, 19 fois sur 20.