La Commission des services électriques de Montréal, qui fête ses cent ans, a été un témoin direct de l’essor des réseaux de télécommunications au cours des dernières décennies. Survol historique.
Le 27 juin 2010, la Commission des services électriques de Montréal, qui responsable de la gestion et de l’entretien des infrastructures requises pour l’enfouissement des fils sur le territoire montréalais, a fêté ses cent ans.
Cet organisme, qui constitue le premier partenariat public privé – et qui donne des résultats probants – a été créé par un décret prononcé en 1909 par la Ville de Montréal, à la suite d’une autorisation du gouvernement du Québec.
Au début du 20e siècle, les installations de fils électriques de téléphonie et de télégraphie se multiplient à Montréal qui est alors la métropole du Canada. Or, la grande quantité de fils qui sont suspendus aux poteaux sur les trottoirs de la ville constitue une nuisance visuelle, mais représente aussi un risque d’incendie. En 1907, l’organisme Fire Underwriter Laboratories qualifie même Montréal de « ville la plus dangereuse au Canada ».
À l’origine, la Commission des services électriques de Montréal desservait 33 usagers, dont 17 compagnies d’électricité, six compagnies de téléphone et de télégraphe et quatre exploitants de tramways. Le premier projet d’envergure de la Commission des services électriques de Montréal, réalisé entre 1910 et 1915, consiste à enfouir les fils électriques sur la rue Sainte-Catherine, entre les rues Atwater et Papineau. L’installation de lampadaires à l’électricité qui produisent une lumière blanchâtre, en remplacement des réverbères au gaz qui produisaient une lumière bleutée, donne à l’artère le surnom de « Grande voie blanche » (Great White Way). En 1929, tout le filage du centre-ville de Montréal est enfoui.
Au cours des décennies suivantes, marquées par la Grande Dépression et la Deuxième Guerre mondiale tout comme par l’agrandissement et la modernisation de Montréal, la Commission des services électriques de Montréal multiplie les projets d’enfouissement. Une entente paraphée entre la Ville de Montréal et Hydro-Québec en 1983, qui porte le nom d’Entente de 1983-1989, a résulté en la reconstruction de 150 kilomètres du réseau souterrain et l’ajout de plus de 100 kilomètres de conduits.
Après la Crise du verglas en 1998, la Commission des services électriques de Montréal a élaboré des plans directeurs qui visent l’enfouissement des fils sur quarantaine de kilomètres, le long d’artères qui mènent à des endroits névralgiques, afin d’améliorer notamment l’efficacité des personnes lors d’interventions d’urgence. Ce plan directeur fait présentement l’objet de discussions avec des intervenants gouvernementaux.
Soulignons que les conduits de la Commission des services électriques de Montréal sont situés dans la plupart des cas au niveau des trottoirs. Ainsi, les travaux de l’organisme ont des impacts moindres sur la chaussée et la circulation des véhicules.
Installation de cables à la Place-d’Armes en 1916 (Collection des archives de la ville de Montréal, fonds de la Commission des services électriques de Montréal).
L’impact des télécoms
Aujourd’hui, la Commission des services électriques de Montréal exploite un réseau de plus de 688 kilomètres de conduits qui sont utilisés par 88 usagers.
Plusieurs de ces usagers sont des fournisseurs de services de télécommunications aux résidants, aux commerces et aux entreprises, qui détiennent au total 15 % des fils installés dans les conduits souterrains de l’organisme. La majorité des fils présents dans le conduits (70 %) sont des câbles d’Hydro-Québec, alors que l’autre 15 % de fils appartiennent à la Ville de Montréal, pour le contrôle des feux de circulation, les communications des services 311 et 911, etc.
Les conduits de la Commission des services électriques de Montréal sont utilisés à 70 % de leur capacité, alors que l’espace restant constitue une réserve pour l’ajout de nouveaux usagers ou l’addition de liaisons par les usagers actuels.
Serge Boileau, le président de la Commission des services électriques de Montréal, rappelle que la câblodistribution et la téléphonie avancée avaient entraîné une première croissance du filage lié aux télécommunications dans les années 60.
« L’apparition de nouveaux utilisateurs a incité alors la Commission à repenser le déploiement des conduits souterrains », indique-t-il, en confirmant que la proportion de fils dédiés aux télécommunications ne cessait de croître dans les circuits souterrains. Certes, l’intérêt envers Internet a entraîné une croissance des usagers et du filage lié aux télécoms depuis milieu des années 90.
D’ailleurs, alors que les communications sans fil faisaient l’objet d’une expansion soutenue, M. Boileau rappelle que certains observateurs envisageaient un déclin de la réseautique filaire pour l’acheminement des données.
« Mais les gens ont un peu déchanté parce qu’il y a de l’interférence en milieu urbain, en raison de la densité. De très bons systèmes servent à la téléphonie mobile, mais pour le maintien de liaisons permanentes, on ne peut se fier aux aléas des interférences », indique-t-il.
« Avec la technologie de fibre optique, les fournisseurs en télécommunications, depuis la déréglementation des marchés, sont à développer de grands parcs de réseaux pour assurer que leurs liens de transfert de données sont efficaces. Pour ce faire, ils utilisent encore le système de conduits souterrains afin d’avoir une interface physique pour joindre les deux bouts. »
M. Boileau ajoute que la fibre optique est utilisée pour remplacer de gros câbles en cuivre dans les conduits – ce qui libère de l’espace – mais il précise que la Commission des services électriques de Montréal ne connaît pas les plans stratégiques de ses clients et ne peut formuler la proportion de chacun des types de liaison au sein de ses infrastructures.
Les cent ans de la Commission des services électriques de Montréal font l’objet de l’exposition 100 ans sous terre au Musée Pointe-à-Callières jusqu’au 29 août 2010. L’accès à l’exposition est gratuit.
Jean-François Ferland est rédacteur en chef adjoint au magazine Direction informatique.