Le Comité permanent sur l’accès à l’information, la protection des renseignements personnels et l’éthique de la Chambre des communes s’est penché cette semaine sur la nomination de l’ancien ministre de l’Industrie, des Sciences et du Développement économique, Navdeep Bains, au poste de directeur des affaires générales de Rogers.
Les critiques ont fait part de leurs inquiétudes quant au fait que sa nomination donnerait à Rogers un moyen facile de faire pression sur le gouvernement, en particulier après la clôture de son accord de fusion de 26 milliards de dollars canadiens avec Shaw.
Bains a dirigé le secteur des télécommunications au nom du gouvernement libéral de 2015 à janvier 2021.
Le député néo-démocrate Brian Masse a qualifié Bains, dans une déclaration au National Post, « d’architecte de la politique de télécommunications actuelle du Canada qui permet aux fournisseurs de télécommunications de facturer certains des coûts de téléphonie cellulaire les plus élevés au monde ».
Au moment de sa nomination en avril, un porte-parole a déclaré au Financial Post que Bains aurait obtenu l’autorisation des commissaires à l’éthique et au lobbying pour rejoindre Rogers.
La commissaire au lobbying Nancy Bélanger a cependant affirmé que ce n’est pas son rôle d’approuver où les gens vont travailler. Elle a dit qu’elle est uniquement responsable de s’assurer que les anciens titulaires de charge publique ne communiquent pas avec les fonctionnaires fédéraux pendant les cinq premières années de leur nomination.
Cependant, ce qui est « frustrant » dans ce cas précis, a déclaré Mme Bélanger, c’est le fait que, parce que Rogers est une société (contrairement à une organisation), Bains sera autorisé à consacrer 20 % de son temps au lobbying au nom de Rogers.
« Cette Loi sur le lobbying doit être modifiée. Il y a des lacunes, il y a des échappatoires et il y a beaucoup de lobbying qui peut se produire sans que les gens le sachent, et il est maintenant temps de commencer à y remédier. Donc, j’ai l’impression d’être un disque rayé quand je répète sans cesse les problèmes de la loi », a-t-elle déclaré.
Nancy Bélanger a déclaré avoir soulevé cette divergence en février 2021 dans ses recommandations préliminaires pour améliorer la loi, mais pourquoi elle n’a pas été résolue reste « une bonne question ».
La Loi sur le lobbying a été introduite en 2008 et n’a été révisée qu’une seule fois, en 2012.
Le porte-parole de Navdeep Bains a clairement indiqué qu’il ne se livrerait à aucune activité de lobbying, mais son rôle couvre toujours les affaires gouvernementales, y compris les relations avec les parties prenantes et le lobbying auprès des différents niveaux de gouvernement.
Nancy Bélanger soutient toutefois que la Loi sur le lobbying demeure restrictive. « Il y a beaucoup de gens à qui il ne pourrait probablement pas parler, à la lumière du code de conduite. Je suis donc convaincu qu’avec le régime – bien sûr, avec les faiblesses qui existent – nous avons mis en place certains paramètres pour essayer de réduire ce risque de conflit réel ou de création d’un sentiment d’obligation. »
De plus, Lyne Robinson-Dalpé, directrice des services-conseils et de la conformité du Commissariat aux conflits d’intérêts et à l’éthique, a affirmé qu’il n’y a eu aucune violation de l’article 35 de la Loi sur les conflits d’intérêts, qui établit des restrictions pour les anciens titulaires de charge publique d’accepter un emploi auprès d’entreprises avec lesquelles ils entretenaient des relations officielles importantes.
Plus précisément, M. Bains a observé une période de restriction de deux ans avant de pouvoir accepter l’emploi qui lui avait été proposé, a déclaré Mme Robinson-Dalpé.
Ce n’est pas la première fois qu’un ancien fonctionnaire rejoint une grande entreprise fortement réglementée et dépendante du gouvernement. Plus tôt cette année, TELUS a annoncé la nomination de l’ancien vice-premier ministre du Canada, John Manley, au poste de président du conseil d’administration.
Adaptation et traduction française par Renaud Larue-Langlois.