INTERNOTE – Les microblogues, Twitter étant l’exemple du genre, sont des outils conçus à l’origine pour informer la communauté de ce que vous faites. Mais ce n’était que le début : on s’en sert aujourd’hui à toutes les sauces.
« What are you doing? », telle est la question posée par Twitter lorsque vous vous branchez sur sa page d’accueil. Et vous avez 140 caractères pour répondre à cette question dans votre message de statut ou mise à jour, ou plus simplement un tweet.
Bien sûr, informer de ce qu’on est en train de faire n’a de sens qui si on le fait pour son entourage, ses amis, ses collègues. Il faut donc créer une communauté de gens qui nous « suivent » ou qui sont nos abonnés. Et vice-versa. Tant et si bien que, si je me prends en exemple, je suis abonné aux mises à jour de 73 personnes et 119 personnes me suivent. Ce qui est un profil bien humble. D’autres sont plus populaires que moi : Loic Le Meur, par exemple, compte autour de 14 000 abonnés ou encore Mitch Joel, avec ses quelque 3 500 abonnés.
Ainsi, chaque fois que vous publiez un message, les membres de votre communauté d’abonnés sont avertis de ce que vous faites ou avez envie de partager, à la condition que leur client Twitter soit ouvert (ou qu’ils soient branchés via l’interface Web). En 140 caractères.
Évidemment, comme tout service, l’usage de départ a nécessairement évolué dans toutes les directions. Plusieurs s’en servent pour faire un peu d’autopromotion, du genre venez lire mon dernier billet sur mon blogue, visiter mon site ou écouter ma récente baladodiffusion. Il y a même moyen d’automatiser cela, en faisant en sorte que les nouvelles entrées d’un fil RSS (et par conséquent les dernières publications d’un blogue ou d’un site) soient automatiquement transmises via un compte Twitter.
En matière d’autopromotion, entreprises et médias s’y adonnent (nous le faisons nous-mêmes d’ailleurs avec le profil @DirectionInfo, mais c’est aussi le cas de Radio-Canada, du journal Les Affaires ou encore de sociétés comme Gartner et Forrester et des organisations comme l’Association canadienne des journalistes – CAJ). Mais ce fut également le cas des partis politiques lors des récentes campagnes électorales fédérales et provinciales, avec des succès mitigés et inégaux. Si le microblogue est utilisé qu’à des fins promotionnelles, certains abonnés décrochent : la communauté doit continuer d’exister après la campagne électorale et à ce jour, c’est pauvre comme résultat.
Les microblogues sont également utilisés pour faire office d’interface de partage d’information tierce, par exemple, je vous suggère d’aller lire ceci parce que c’est d’intérêt, à mon avis. Ou avez-vous vu ce clip sur YouTube? Wow! Vous comprenez le principe.
Conversations
Autre usage : la conversation. C’est alors que Twitter devient une messagerie instantanée où tout le monde de la communauté écoute la conversation qui se déroule entre deux personnes. Cela vous rappelle-t-il les lignes téléphoniques rurales d’autrefois? C’est tout comme.
Certains utilisateurs se plaignent du bruit que ces conversations à deux ou à trois personnes génèrent. Il est toutefois possible cependant de limiter un peu ces conversations, dans certains clients Twitter en éliminant les réponses de conversations si l’interlocuteur destinataire n’est pas membre de notre communauté.
Reportages en direct
Le reportage en direct est également un usage qui se répand. Je l’ai personnellement expérimenté à quelques reprises lors du Colloque québécois de la sécurité de l’information (CQSI). Pour ce faire, j’ai utilisé un mot clé précédé du symbole de numéro (en anglais, un hash tag) , en particulier ici #CQSI. Si vous faites une recherche sur ce mot-clé avec le moteur de recherche de Twitter, vous trouverez tous les messages que j’ai rédigés lors de ce colloque (voir ici). Cela devient encore plus intéressant si plusieurs microblogueurs utilisent le même mot clé, comme lors de la conférence Réinventer l’innovation, dont on trouvera les entrées de reportage en direct ici.
Twitter a également servi de canal d’information en direct lors des événements survenus à Mumbai en Inde dernièrement, avec des contributions de nombreux membres de la communauté y ont contribué de l’information exclusive et pertinente, relayée par d’autres membres de la communauté vers leur groupe d’abonnés respectifs. (On retrouvera tout sous le mot-clé #mumbai via http://search.twitter.com – mais attention, il s’y est ajouté aussi du « bruit »).
Autre exemple, les étudiants en journalisme de l’Université de Montréal ont utilisé leur profil commun (@hebdomatrix) pour microbloguer pendant le congrès de la Fédération professionnelle des journalistes du Québec. Ils s’y sont d’ailleurs mis à plusieurs pour le faire et chacune des entrées du microblogue comporte les initiales de l’auteur at), nf), jt), sm), cl), es) (et j’en oublie peut-être, désolé).
Les applications en entreprise
On peut facilement imaginer des applications en entreprises de tels microblogues, qui se dérouleraient en privé, derrière les frontières de l’organisation. Histoire d’informer sur ce qui se passe, former des communautés relatives à des projets en cours et communiquer en direct avec tout le groupe de travail en simultané.
L’organisation privilégiera sans doute une forme privée de microblogues, pour éviter des pertes d’information non désirées. À ce sujet, on connaît notamment le service Yammer, qui est une forme hybride de la chose, permettant à une organisation de créer une zone de microblogue à accès limité sur ce service d’hébergement. Vous pouvez également utiliser et déployer à l’interne un outil en code source libre comme laconi.ca, lui-même à la base sur service de microblogue public identi.ca.
Dernièrement, @Emergent007 (Claude Malaison) m’indiquait la source suivante afin d’en savoir plus sur toutes les solutions de microblogue qui s’offrent aux organisations, et en comparer les diverses fonctionnalités.
Le modèle d’affaires
Si de nombreux utilisateurs, on en compte 6 millions apparemment, misent sur ce service pour rester en contact avec leur communauté d’abonnés, le service Twitter – gratuit jusqu’à maintenant – ne génère pas encore de revenus et ses coûts ne cesseront sans doute pas d’augmenter. La société, fondée par Evan Williams qui avait également lancé le service Blogger subséquemment racheté par Google, a levé quelque 20 millions de dollars en deux rondes de financement, mais vient de refuser 500 millions de dollars de la part de Facebook qui voulait l’acquérir.
Ce qui n’est pas sans nous rappeler la glorieuse époque de la bulle des sociétés point-com, n’est-ce pas? Des idées géniales, mais peu de revenus. La crise financière incite sans doute à la consolidation en ce domaine; d’ailleurs un autre service de microblogue, Pownce, racheté récemment par Six Apart (Typepad), fermera ses portes sous peu.
Ainsi donc, parallèlement à son développement, la société Twitter commence à explorer diverses avenues de monétisation afin de couvrir ses frais, comme le confiait récemment son fondateur au magazine économique L’Expansion. Un plan qui devrait se déployer à partir de 2009. Et qui pourrait passer par le développement d’une offre premium.
À suivre, sans doute sur Twitter.
Patrice-Guy Martin est rédacteur en chef du magazine Direction informatique.
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