Sensibill remporte le prix « Éclair de génie » en permettant aux utilisateurs d’applis bancaires de surveiller leurs habitudes de consommation.
Une entreprise torontoise de technologie financière est le premier lauréat du prix Éclair de génie de l’Association canadienne des technologies de l’information (ACTI) pour avoir aidé des institutions bancaires d’Amérique du Nord et d’ailleurs à combler une lacune essentielle de leurs services mobiles.
Cofondée par un ancien avocat qui ne connaît que trop bien les aléas du suivi des dépenses, Sensibill offre aux banques une plateforme de suivi des reçus qui peut s’ajouter à leurs applis.
Ainsi, les utilisateurs peuvent se connecter à la plateforme Sensibill à partir de leur appli bancaire – la Banque Scotia, la Banque TD, RBC Banque Royale et la Banque de Montréal ont toutes incorporé ce service – pour retracer leurs achats à toutes sortes de fins : le calcul des taxes, la comptabilité, la gestion des dépenses, le budget, le suivi des garanties, ou les échanges et retours.
« Les banques n’ont pas accès aux données des reçus de caisse », explique à ITWC Corey Gross, cofondateur et chef de la direction de Sensibill. « Elles ne disposent que des données dites de premier niveau, les données de la transaction, qui ne sont même pas nettoyées. Ainsi, le consommateur qui consulte son relevé de carte de crédit en ligne voit qu’il a dépensé 64 $ chez Home Depot ou 180 $ sur Amazon, mais c’est à peu près tout… Le relevé ne contient aucune preuve d’achat. On ne sait même pas ce qu’on a acheté. »
En revanche, la solution Sensibill donne au consommateur la possibilité de prendre une photo de ses reçus physiques en plus d’importer automatiquement tous les reçus électroniques d’achats faits en ligne ou en magasin. Selon Corey Gross, les banques y gagnent surtout une meilleure compréhension des habitudes de leurs clients.
« Si, comme de plus en plus de gens, vous magasinez toujours sur Amazon, cela peut signifier que vous aimez acheter des vêtements, ou encore des appareils électroniques coûteux. En sachant quels types de produits vous achetez, la banque pourra mieux vous informer des services financiers qui vous seraient utiles », poursuit-il. « Finalement, du point de vue de la mission et de la vision, nous croyons que l’avenir des services financiers dépend de leur capacité à personnaliser leurs services à la clientèle. Et si les banques n’agissent pas en ce sens, quelqu’un d’autre le fera. »
Ce produit est parfaitement adapté au marché canadien, souligne Corey Gross, car les Canadiens font beaucoup confiance à un petit nombre d’institutions bancaires, ce qui donne à celles-ci une grande crédibilité sociale, tout en les obligeant à servir leurs clients au meilleur de leur capacité.
« Elles ont de la crédibilité, donc elles devraient aussi être en mesure de servir leurs clients le mieux possible, et actuellement, dans les faits, elles n’y arrivent pas », dit Corey Gross. « Alors nous travaillons avec elles pour qu’elles puissent mieux faire. »
De Smartslips à Sensibill
En fait, Sensibill n’est pas le premier produit développé par Corey Gross pour résoudre ce problème, qui s’est présenté pour la première fois lorsqu’il exerçait la profession d’avocat, vers 2005.
« En fait de produits, il n’existait pas de bonne solution pour m’aider à gérer mes dépenses », dit-il.
« C’était très ardu d’administrer tous ces reçus et de les conserver sans qu’ils pâlissent ou se détruisent, comme ils ont fortement tendance à le faire… et un cabinet d’avocats ou de comptables a besoin de conserver ces originaux dans un état impeccable. C’est ce que la technologie numérique nous permet. »
Et si les magasins App Store et Google Play regorgent d’applis de reçus, poursuit-il, aucune n’a résolu ce problème criant : faciliter la gestion des reçus.
Corey Gross a donc décidé de s’attaquer au problème selon une perspective d’affaires. Fondée en 2010, sa première entreprise, Smartslips, était une solution infonuagique mise à la disposition des commerçants pour fournir à leurs clients des reçus de caisse numériques.
« Ça n’a pas marché aussi bien que prévu, mais ça nous a permis de travailler avec de gros clients et partenaires, de trouver plusieurs conseillers dont je me suis entouré, et d’apprendre plein de choses sur ce qu’il faut avoir pour être un bon entrepreneur », raconte-t-il. « J’ai fini par vendre des actifs [de Smartslips], mais je me suis bâti un bon réseau. »
Finalement, poursuit-il, les banques avec qui il était entré en relation l’ont approché pour lui soumettre leur propre problème criant : quand elles investissaient dans des solutions numériques telles que les paiements sur mobile, elles avaient souvent du mal à susciter l’intérêt de leurs clients; or, elles voyaient un élément de solution dans l’amélioration de la gestion et de la saisie des reçus.
Avec l’aide des banques, les deux fondateurs, Corey Gross et Jamie Alexander, ont commencé à exploiter Sensibill en 2013 à partir de la Zone des médias numériques (Digital Media Zone ou DMZ) de l’Université Ryerson. « Je suis devenu, qui l’eût cru, le gars des reçus. Et c’est ce germe qui a donné naissance à Sensibill », dit-il. « C’est depuis ce temps-là que nous travaillons avec des banques. »
Depuis 2013, l’effectif de Sensibill est passé de deux à plus de soixante personnes. L’entreprise est maintenant installée dans son deuxième bureau. Pour Corey Gross, le principal facteur de succès de la plateforme est son accessibilité. Au lieu de construire une appli pour des utilisateurs déjà noyés sous des dizaines d’autres, on leur donne accès à ses fonctionnalités à partir de services qu’ils utilisent déjà.
En fait, selon une recherche soumise avec sa candidature aux prix Ingénieux, les institutions bancaires clientes de Sensibill ont constaté une croissance de 30 % du nombre d’ouvertures de session sur leur appli, et 75 % des utilisateurs déclarent avoir l’intention de demeurer avec leur institution financière précisément à cause de la capacité de saisie de reçus de son application.
En plus de collaborer avec quatre des cinq grandes banques canadiennes, Sensibill travaille aussi avec la division Tangerine de la Banque Scotia, ainsi qu’avec deux banques britanniques, la Royal Bank of Scotland et la National Westminster Bank. Demeurant toutefois avare de détails, Corey Gross avance que l’entreprise compte étendre ses activités à l’Australie et annoncer bientôt un partenariat avec une « très grande » institution américaine. Il souligne cependant que Sensibill espère également travailler avec des coopératives de crédit et des banques de petite taille.
« Nous avons établi notre réputation en collaborant avec de grandes institutions, mais nous descendons lentement vers la base du marché afin de rejoindre les clients, où qu’ils se trouvent », dit-il.
Officiellement, une société primée
Ainsi, Sensibill détient le titre de premier lauréat du prix « Éclair de génie » créé cette année par l’Association canadienne des technologies de l’information (ACTI) pour honorer une entreprise privée canadienne ayant eu, comme le mentionne son site internet, « l’éclair de génie d’un nouveau produit ou service technologique ». Corey Gross déclare qu’il considère ce prix principalement comme une occasion de rehausser le profil public de son entreprise en vue de rencontrer d’autres collaborateurs potentiels.
« Nous ne savions pas que nous allions gagner, mais on veut toujours se présenter sur ces tribunes, mettre en vedette ses réalisations intéressantes et voir ce que ça donnera », dit-il.
« On essaie d’inciter les gens à remarquer ce qu’on fait, afin d’être en mesure de redonner à la communauté, que ce soit sous forme de leadership, de perspectives ou de commandites. »
L’ACTI a remis les prix Ingénieux aux lauréats à l’occasion d’un dîner de gala, le 9 novembre 2017. IT World Canada (ITWC) a agi à titre de média commanditaire.
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