Peu d’entreprises savent qu’elles peuvent participer à des recherches scientifiques sans vraiment débourser, et pourtant c’est facile.
Dans les différents types d’organisations, autant que chez les particuliers, les ordinateurs ne sont pas utilisés de nuit et, souvent, juste une petite partie de la journée. Beaucoup de puissance de traitement informatique est ainsi inexploitée. Il y a cependant moyen d’en faire profiter l’humanité en faisant partie du World Community Grid qui permet à la recherche d’avancer plus rapidement en reliant une quantité d’ordinateurs de 80 pays pour en faire le système informatique le plus puissant au monde.
Un projet humanitaire qui a fait ses preuves
Le World Community Grid (WCG) est parti d’un projet mis sur pied par IBM et quelques chercheurs il y a sept ans environ. Ils ont décidé de tirer profit du potentiel informatique énorme que représentent des millions d’ordinateurs à travers le monde, pas des superordinateurs, mais des ordinateurs ordinaires utilisés par des entreprises et même par le grand public. Au lieu de nécessiter des années de calculs sur un seul ordinateur, l’informatique distribuée permet d’arriver au même résultat en quelques minutes avec un réseau d’ordinateurs en comportant quelques centaines ou même jusqu’à des millions.
Déjà, plusieurs projets de recherche ont été menés à terme, tous parrainés par IBM qui fournit les ressources informatiques de base. Le premier projet, en 2004, avait permis de déterminer les meilleures façons de traiter la variole. Une autre étude a permis de sélectionner les variétés de riz les plus nutritives et les plus résistantes aux parasites ou aux maladies pour les recommander aux cultivateurs des pays pauvres. D’autres séances de calcul de la World Community Grid ont aidé à trouver des médicaments contre la dengue aussi bien qu’à tester les propriétés électroniques de milliers de matériaux organiques qui pourraient être utilisés pour capter l’énergie solaire.
Actuellement, le principal projet a trait à la lutte contre le cancer, en particulier à la recherche sur les protéines liées au cancer pour arriver à formuler des traitements possibles. Le projet Help Conquer Cancer a été mis sur pied par l’Ontario Cancer Institute de Toronto et le Hauptman-Woodward Medical Research Institute de Buffalo. En deux ans et demi, les volontaires membres de la WCG ont fourni aux chercheurs 50 981 années CPU. Chaque journée de traitement de données ainsi offerte correspond à 54 ans d’utilisation d’un seul ordinateur. Cette étude permettra de comprendre beaucoup plus vite comment les cancers se développent et comment arriver à les soigner en connaissant mieux les quelque 12 500 protéines reliées au cancer et en analysant plus de 9 000 photos de chacune d’elles.
On trouve d’autres projets de recherche sur la dystrophie musculaire, le cancer chez les enfants, le traitement du SIDA, etc. Les sujets ne manquent pas et la Word Community Grid pourra contribuer à bien d’autres recherches si davantage de gens mettent leurs ordinateurs à contribution. Néanmoins, on semble y privilégier les calculs liés aux recherches sur la santé, la nourriture et la production d’énergie.
Une participation facilitée au maximum
La World Community Grid traite avec des partenaires, actuellement au nombre de 428, qui sont des grandes entreprises, des universités, des associations ou des fondations impliquées dans le développement humanitaire. Elles-mêmes rassemblent une équipe de membres qui offrent du temps de traitement sur leurs ordinateurs. Actuellement, 1,5 million d’ordinateurs à travers le monde contribuent aux travaux de la WCG. Le Canada compte 12 organisations partenaires auxquelles on peut s’associer. En tout, 45 400 ordinateurs sont connectés au réseau par 10 798 membres, entreprises ou individus. C’est peu, mais c’est déjà beaucoup puisqu’il faut bien comprendre que des calculs, qui auraient autrement duré des années, peuvent se faire en quelques minutes ou quelques heures.
C’est facile de se joindre à la World Community Grid. Il suffit d’avoir un ordinateur relié à Internet, d’aller s’inscrire sur le site de la WCG, de télécharger un logiciel et de l’installer sur son ordinateur. Tout est automatisé, sans qu’on ait à intervenir, et le logiciel d’IBM permet un accès de l’extérieur sécurisé au maximum quand l’ordinateur n’est pas utilisé à d’autres fins. Par la suite, on peut avoir accès à quelques statistiques sur la part jouée par notre ordinateur dans l’ensemble des calculs. Tous les ordinateurs ne sont pas exploités pour le même projet, mais leur puissance de traitement est répartie entre différents projets par des serveurs d’IBM qui gèrent le travail de l’ensemble de ces appareils.
En plus d’accélérer les calculs, ce réseau communautaire mondial fait faire des économies importantes à des centres de recherche qui risqueraient de ne pas avoir les moyens d’aller au bout de leurs travaux et d’arriver à des résultats importants pour l’humanité. De plus en plus de gens y participent. Juste en avril, 22 000 ordinateurs s’y sont ajoutés, mais le WCG pourrait en supporter beaucoup plus, à la limite le milliard d’ordinateurs que compte la planète. Selon le docteur Igor Jurisica de l’Ontario Cancer Institute, les volontaires qui acceptent de prêter du temps de traitement de leur ordinateur peuvent être fiers du résultat.
IBM a publié un court métrage intitulé Surplus PC Power Yields Faster Cancer Research (en anglais seulement).
François Picard est journaliste et éditeur du magazine Atout Micro.