En appliquant le concept de Lean Manufacturing aux processus d’affaires, une entreprise peut optimiser ses activités selon les besoins particuliers de ses clients et, ainsi, leur offrir une valeur ajoutée substantiellement plus grande. Le fabricant québécois d’ameublements de bureau Artopex a appliqué ce principe avec succès.
Le Lean Office est une méthode fondée sur le système de production de Toyota (Toyota Production System, ou TPS), au moyen duquel cette entreprise a connu de vifs succès dans la deuxième moitié du XXe siècle, devenant récemment le premier constructeur automobile mondial. Dérivé du Lean Manufacturing et parfois appelé « bureau à valeur ajoutée », le Lean Office s’applique aux tâches administratives, lesquelles reposent en grande partie sur les TI.
Il prône l’accélération du traitement de l’information, l’allégement du travail et l’amélioration de l’efficacité du personnel. Pour y arriver, le Lean Office utilise des outils comme la normalisation des tâches, la qualité à la source, l’organisation du poste de travail, les contrôles visuels et la fiabilité de l’équipement.
L’un de ses objectifs fondamentaux est de rendre plus efficaces les interactions avec les clients grâce à l’élimination du gaspillage. Dans les tâches administratives, ce dernier peut prendre diverses formes : retards, accumulation de dossiers, déplacements et mouvements inutiles, information inadéquate, étapes et activités inefficaces… L’éradication du gaspillage passe par l’optimisation des tâches à valeur ajoutée et l’élimination de celles qui en sont exemptes, d’un bout à l’autre de la chaîne d’approvisionnement.
Cet objectif ne sera viable que s’il découle d’une démarche axée sur le client. En effet, la valeur ne peut être définie que par le client et n’a de sens que pour un produit ou un service qui répond à ses besoins. Les étapes nécessaires à cette transformation apportent une valeur ajoutée. Par conséquent, le point de départ du Lean Office est nécessairement l’analyse des besoins du client et la création d’un produit ou d’un service dont les caractéristiques et le prix comblent les exigences de la clientèle.
Un autre concept fondamental du Lean Office consiste à schématiser précisément l’ensemble des activités clés marquant le cycle du produit, du service ou de l’information. La cartographie de la chaîne de valeur (Value Stream Mapping) est un outil qui facilite cette tâche. Indiquant comment se déroule le travail et comment l’améliorer, la cartographie de la chaîne de valeur assure une compréhension commune des processus et engage la participation des personnes concernées. Elle procure une vue d’ensemble des activités tout en établissant des liens entre les flux physiques et informationnels.
Cette méthode prépare le terrain pour l’exécution des processus en continu, sans interruption, ce qui va à l’encontre de la méthode traditionnelle qui consiste à compartimenter le travail en lots ou en services. L’objectif est de faire circuler l’information et les documents de façon fluide.
Au fur et à mesure que s’accélère le flux de la valeur, l’organisation est en mesure d’éliminer le gaspillage. Plus elle permet au client de définir la valeur, plus elle trouvera d’obstacles à éliminer. De fil en aiguille, les processus se raffinent et l’amélioration devient une démarche permanente. En bout de piste, la perfection ne semble plus hors de portée et devient même un objectif.
L’exemple d’Artopex
La mise en pratique des concepts du Lean Office peut procurer des avantages très marqués.
L’une des plus importantes entreprises de son secteur à l’échelle nord-américaine, Artopex fabrique et distribue une gamme complète de produits et de systèmes d’aménagement de bureau. Entre février 2006 et février 2007, l’entreprise a procédé à une transformation de ses processus d’affaires touchant le service à la clientèle.
La direction souhaitait réduire les délais liés à l’entrée et à la modification des commandes ainsi qu’au service après-vente. Par ailleurs, elle cherchait à éliminer les activités sans valeur ajoutée, à réduire les heures supplémentaires et à améliorer le climat de travail au sein de l’équipe du service à la clientèle.
Dans le cadre de ses démarches de transformation, l’entreprise a déterminé quels devaient être ses projets d’amélioration à l’aide d’ateliers de travail de type kaizen, de la cartographie de la chaîne de valeur et des outils propres au Lean Manufacturing. Ces efforts ont mené au choix de 65 projets d’amélioration.
Pour les mener à bien, la direction a donné au personnel une formation sur les concepts du Lean Office et engagé la participation de tous à la transformation. Des mesures concrètes d’amélioration du service après-vente et du service à la clientèle ont été adoptées, notamment le développement d’un outil de suivi des demandes et la mise en oeuvre d’indicateurs de performance.
Les résultats obtenus sont impressionnantsnbsp;: réduction de 50 % des délais dans le traitement de nouvelles commandes et des demandes formulées au service après-vente; baisse du ratio de rotation du personnel de 50 % à 5 %; diminution de 40 % du nombre d’appels de suivi faits par les clients au service après-vente; et réduction des heures supplémentaires de moitié, ce qui s’est traduit par une contraction du personnel de l’ordre de 10 % par un phénomène d’attrition.
Le Lean Office offre un vaste potentiel. Son efficacité est attribuable en grande partie au fait qu’il cherche à améliorer le rendement des organisations par l’entremise des processus, et non pas du personnel directement. Car une idée demeure ancrée que si les employés faisaient leur travail correctement, les problèmes des entreprises s’amenuiseraient de façon importante. Selon le pionnier de la qualité J.M. Juran, il s’agit là d’une fausse croyance. À cet effet, il a développé une théorie stipulant que de façon générale seulement 15 % des problèmes des entreprises relèvent du personnel, contre 85 % pour les processus.
Sur cette base, les entreprises trouveront dans le Lean Office une formidable occasion d’optimiser les processus liés aux TI et aux affaires dans leur ensemble.
Luc Poulin est vice-président, marketing et communications, chez Le Groupe Créatech