INTERNOTE Les Québécois s’abreuvent volontiers à Internet, mais sont bridés par les tarifs du sans-fil. Cependant, la croissance de l’utilisation semble plafonner.
Hier, dans la foulée de la Boule de cristal du CRIM, le Cefrio présentait les résultats de NETendances 2008, sa dernière étude globale de l’utilisation d’Internet. Le Cefrio scrute les habitudes virtuelles des adultes québécois depuis 1999 au moyen de sondages. Au fil des ans, on a pu voir que l’accès à Internet et son utilisation a été semblable à celui d’une bonne action en bourse au cours d’une période de croissance continue : ça monte, ça monte.
Au terme des sondages mensuels menés en 2008, un grand constat s’impose : l’utilisation du réseau Internet est passée d’une activité exotique ou – permettons-nous un jeu de mots facile – « branchée » à celui d’une activité ordinaire et banale, mais essentielle. Ce phénomène est semblable à celui qu’a autrefois connu l’utilisation du téléphone, de l’automobile, du téléviseur…
Par ailleurs, si des gens de toutes les catégories d’âge et sociales utilisent Internet, le profil global des internautes reste sensiblement le même au fil des ans : plus un Québécois est jeune, fortuné et scolarisé, plus il est susceptible d’être un grand adepte du Web. Au fil des ans par contre, ce profil devrait évoluer au fur et à mesure que les personnes âgées « se convertiront » à Internet. Ce phénomène, indique Najoua Kooli, la responsable du projet NETendances au Cefrio, est déjà amorcé et se traduit ainsi : entre 2006 et 2008, le pourcentage d’aînés de 65 ans et plus utilisant Internet est passé de 25,8 % à 35 %.
Plafonnement ou pause?
« Vous, personnellement, depuis les sept derniers jours, avez-vous utilisé Internet au moins une fois? » Cette question, beaucoup plus « contraignante » qu’une simple demande sur « l’utilisation récente d’Internet » par exemple, permet d’obtenir une image plus précise de l’utilisation d’Internet. En 2008, sept adultes québécois sur dix (71,7 %) ont utilisé Internet sur une base régulière.
Cette proportion est à peine supérieure à celle de 2007 où 71,4 % des adultes du Québec en avaient fait usage, ce qui laisse croire à un certain plafonnement ou pause de la croissance. Cette proportion indique qu’il y a donc près de 4,4 millions d’internautes au Québec; ceux-ci naviguent sur la Toile en divers lieux, au moyen de connexions diverses pour exercer de multiples activités.
Sur le plan des équipements, 74,6 % de foyers étaient branchés à Internet et 61,8 % l’étaient grâce à la haute vitesse; notons que la haute vitesse est très populaire et que la différence de pourcentage tient vraisemblablement plus à l’absence de la haute vitesse qu’au désir de rester à la basse vitesse.
On note en outre que 74,8 % des Québécois possèdent au moins un appareil mobile (ordinateur portable, téléphone cellulaire, assistant numérique personnel ou téléphone intelligent). De ce dernier groupe, si on ne retient que ceux dont l’appareil permet de se brancher à Internet, il apparaît qu’il y a quelque 400 000 « mobinautes » au Québec.
Pourquoi le Web?
Le Web, pourquoi? Pour trouver des informations sur l’actualité, la planification de vacances, la santé, les services gouvernementaux, les élections (quand il y en a), trouver un emploi. Fait intéressant, à la question « Actuellement, quelle est votre principale source de nouvelles ou d’information? », 63,2 % des répondants répondent la télévision et 15,2 %, les journaux, mais 13,3 % indiquent Internet.
Qu’est-ce à dire? Que la presse traditionnelle est en danger devant la montée en force des Net Newsers qu’on décrit ainsi : « Cette nouvelle catégorie d’utilisateurs Internet est caractérisée par le fait que leur consommation d’actualités essentiellement en ligne (les) Net Newsers sont relativement jeunes et instruits, ils s’abreuvent principalement aux blogues politiques et délaissent les bulletins d’informations télévisés et ils utilisent des agrégateurs de contenu (fils RSS) pour consommer leur information durant le jour. »
Parmi les autres grands usages d’Internet, on retrouve évidemment ces usages : communication (courriel et communication directe en mode texte ou vidéo), divertissement (visionnement de vidéos et de photos, jeux), transactions bancaires et expression de soi au moyen d’outils dits du Web 2.0.
Sur ce point, il y a un léger ralentissement de l’action directe au profit d’une participation plus passive; ainsi, on blogue moins qu’en 2007. Peut-être est-ce dû au déplacement vers d’autres types de sites (wikis et sites de réseautage), qui ont vu leur fréquentation augmenter. On ne peut aussi considérer le fait que certains blogueurs, une fois les premiers moments d’ivresse passés, ont été confrontés à la dure réalité des blogues, une activité qui est fort exigeante si on veut faire correctement les choses…
Trop cher?
De cette grande photographie des habitudes et comportements virtuels des Québécois, il ressort une donnée qui a l’apparence d’une contradiction : les Québécois ont adopté Internet et possèdent les moyens matériels pour aller fureter sur le réseau. Par contre, bien qu’ils soient quelque 400 000 à posséder un appareil leur permettant théoriquement d’accéder à l’Internet mobile (sans fil), ils sont seulement une poignée à le faire (10 % des propriétaires d’un téléphone cellulaire et 33 % des détenteurs d’un assistant numérique ou téléphone intelligent).
Selon Philippe Le Roux, président de VDL2, une entreprise qui a collaboré à l’étude, cela tient essentiellement aux tarifs très élevés des communications sans fil au pays comparativement à ceux en vigueur en Europe et en Amérique latine par exemple. Une question en forme de réponse fut d’ailleurs posée lors de la conférence de presse consacrée aux résultats de NETendances : « Y a-t-il une véritable concurrence dans le sans-fil au pays? »
Méthodologie : dans le cadre du sondage Omnibus de Léger Marketing, l’enquête NETendances a interrogé au téléphone plus de 12 159 répondants adultes au cours de 2008 (marge d’erreur de ±0,89 %), à raison d’un minimum de 1 000 Québécois chaque mois (400 pour la région métropolitaine de recensement de Montréal, 300 pour celle de Québec et 300 ailleurs au Québec). L’échantillon de numéros de téléphone a été généré aléatoirement à l’aide du système Échantillonneur Canada, qui permet de joindre tous les ménages privés possédant le téléphone, y compris ceux dont le numéro ne figure pas dans l’annuaire.
François Huot