À la lecture de notre reportage de couverture, vous constaterez que le Québec est en route vers un dossier de santé électronique. La route est longue.
C’est en 1993 qu’on a commencé à parler pour la première fois d’une forme de dossier de santé électronique sous la forme d’une carte à puce, faisant l’objet d’un projet pilote de la Régie de l’assurance-maladie du Québec, dans la région de Rimouski.
Pour notre article de couverture ce mois-ci, notre journaliste Jean-François Ferland a rencontré le sous-ministre associé à l’Inforoute Santé au gouvernement du Québec, grand responsable du dossier de santé (électronique) Québec. Il a aussi discuté avec des responsables d’Inforoute Santé du Canada, un organisme dont le but est de synchroniser, si on peut s’exprimer ainsi, les efforts des diverses provinces canadiennes à cet égard.
Le dossier électronique de santé du Québec pourrait être mis en place au cours de l’exercice 2009-2010. Voilà donc plus de 15 ans qu’on tergiverse avec l’idée d’avoir ou non, un type dossier de santé sous une forme virtuelle, qui soit transportable, accessible, contrôlé, numérisé, sécuritaire, unique et franchement utile.
Mais, il y a encore loin de la coupe aux lèvres. Les responsables en place changent, mais le résultat demeure toujours tout aussi lointain, me semble-t-il. Combien de ministres ont occupé le siège de la Santé depuis 1993? On ne les compte plus.
Quelque chose m’échappe ici. Comment peut-on réussir à prendre tant de temps à mettre en place ce genre d’initiative?
Du côté de Google…
Pendant ce temps, au sud de la frontière, la vice-présidente des produits de recherche de Google Marissa Mayer annonce, officiellement, en 2007 la création du « service » Google Health. En février 2008, projet pilote avec la Cleveland Clinic, et le service est lancé officiellement en version bêta en mai 2008.
On peut craindre Google et sa manière de traiter les informations personnelles, de les analyser et d’en tirer profit. On se doute bien qu’il y a un intérêt de la part de l’entreprise à associer des informations de santé avec différentes autres ressources d’information en santé grâce aux algorithmes des moteurs de recherche et de publicité de Google. Et on a raison de s’en préoccuper.
Il faut quand même se rappeler que lorsque le projet de carte à microprocesseur de la RAMQ à Rimouski a été lancé, Google n’était pas encore fondé et ses fondateurs n’avaient que 20 ans.
Et pourtant, les technologies mises en place par Google pour ce dossier de santé permettent même d’importer des données qui proviennent de différentes cliniques et autres partenaires du milieu de la santé, notamment les pharmacies Walgreens. Le tout via un API qui supporte un sous-ensemble du format CCR (Continuity of Care Record), un format de données défini par l’industrie médicale américaine pour le transfert des données médicales d’un patient d’un prestataire de service à un autre.
Parmi les services complémentaires offerts par Google Health, on retrouve une base de données pour la recherche d’un médecin ou encore l’analyse des interactions potentielles des médicaments.
Malgré toutes les critiques et les dangers relatifs à la protection de la vie privée reliés à la technologie et à l’approche de Google, qu’il ne faut pas exclure du débat, j’avoue être quand même impressionné. Peut-être devraient-ils offrir leur système sous licence à qui voudrait l’utiliser?
Pour le dossier québécois de santé, j’espère que cette fois-ci sera la bonne et que les résistances seront finalement vaincues. Parce que je suis persuadé que le problème n’est pas technologique, mais en est un de résistance au changement et de volonté d’action. Nous avons un nouveau ministre de la Santé depuis quelques semaines. Quelqu’un voudrait-il lui faire suivre ce commentaire?
Patrice-Guy Martin est rédacteur en chef du magazine Direction informatique.