« Bonjour mesdames, regardez votre amoureux, puis regardez-moi à nouveau. Regardez-moi et… votre amoureux une fois de plus. Malheureusement, il n’est pas moi, mais s’il arrêtait d’utiliser du gel de douche pour femme et utilisait plutôt du Old Spice, il pourrait sentir comme s’il était moi. »
Ces annonces d’Old Spice ont fait fureur; plus de 17 millions de visionnements sur YouTube sans compter les 103 000 abonnés sur Twitter et les innombrables « retweets » depuis le lancement de la campagne Web au printemps 2010.
Certes un franc succès si l’on note que les ventes ont augmenté de 106 % entre le 16 mai et le 13 juin 2010 par rapport à la même période en 2009, selon la firme américaine de consultation SymphonyIRI.
« Avec un tel impact, de nombreuses entreprises sont portées à croire que les médias sociaux sont faits pour elles, ce qui peut être une grave erreur », estime Adele McAlear, une consultante montréalaise en médias sociaux et en stratégie marketing.
Pas aussi gratuit que l’on pense
« Une entreprise frileuse à allouer les ressources humaines et monétaires nécessaires n’a pas sa raison d’être sur les réseaux sociaux, explique la consultante. Il y a une perception que les médias sociaux ne coûtent rien, mais c’est faux. Il faut embaucher des gens pour s’en occuper et il faut développer des pages personnalisées ».
De plus, à défaut d’impliquer tous les niveaux hiérarchiques de l’organisation, particulièrement les hauts gestionnaires, une stratégie de médias sociaux pourrait tomber à l’eau, note Mme McAlear, qui a d’ailleurs étécitée par plusieurs publications, dont le New York Times, The Gazette et le Globe and Mail.
Mais selonCarl-Frédéric De Celles,président de iXmédia, une entreprise de la Veille Capitale spécialisée en solutions Web, la question n’est pas universelle.
« Je crois avant tout qu’une entreprise doit avoir maîtrisé le Web 1.0 avant de se lancer dans le 2.0. On ne se lance pas sur les réseaux sociaux si on n’a pas un site Web fonctionnel et si on n’est pas en mesure de répondre aux courriels de ses clients. Il faut maîtriser la base avant tout », dit-il.
Ainsi, la question, selon lui, n’est pas d’y aller ou non, mais du contenu qu’une entreprise y mettra et de la méthode qu’elle emploiera pour le faire.
« Les médias sociaux ne sont pas la panacée »
Une erreur courante, soutient la fondatrice de MA14, Isabelle Lopez, est de croire qu’il faut uniquement faire du média social. « Plus ça va, plus je me rends compte qu’on ne peut se passer du marketing traditionnel. Il y a une raison derrière son existence. Il faut savoir insérer les médias sociaux dans la stratégie. On parle des médias sociaux comme s’ils étaient la panacée. »
Les réseaux sociaux demandent aux entreprises d’abandonner une certaine carapace, croit-elle. MA14 est une équipe de consultants spécialisée dans la création et l’application de concepts et de stratégies en marketing conversationnel.
« Il faut donc être prêt à accepter le chaos et le non-contrôle… et c’est ça qui est difficile », dit-elle.
Mark Goren, stratégiste en médias sociaux et fondateur de Transmission Marketing, croit que l’implication ou non d’une entreprise sur un réseau social dépend de la culture de l’organisation. Il est toutefois catégorique sur la question du contenu. « On ne peut pas s’ouvrir un compte Twitter, pousser du contenu, puis présumer que ça va générer des résultats positifs. C’est conçu pour dialoguer, bâtir des relations et faire partie de communautés. Ce n’est pas un mode de transmission pour faire la publicité de ses produits. »
Écoutez d’abord, passez à l’action ensuite
Une entreprise n’a pas besoin d’être sur toutes les plateformes, estime Mark Goren. C’est pourquoi le stratège conseille à ses clients d’adopter la méthode passive : écouter ce qui est dit à son sujet puis de prendre action en conséquence.
« Si vous écoutez vos clients, actuels et potentiels, et si vous savez ce qui est dit à votre sujet et où c’est dit, vous saurez où aller. Ce ne sont pas toutes les entreprises qui ont leur raison d’être sur Twitter, LinkedIn et Facebook. »
Il est primordial d’être réaliste sur ce qu’on peut soutenir, conseille Adele McAlear. « Combien d’heures voulez-vous y consacrer ? Combien de personnes vont y participer ? N’ayez pas les yeux plus grands que la panse. Commencez petit et grossissez au fur et à mesure. »
Ensuite, recommande-t-elle, faites savoir que vous êtes sur les médias sociaux. « Mettez-le dans la signature de votre courriel, sur vos sacs, etc. »
Finalement, il faut mesurer les résultats. « Combien de membres avez-vous ? Combien de personnes ont parlé de vous ? Faites-vous des balises », conclut-elle.
Audrey MyranD-Langlois