L’intégration de la génération Y dans l’effectif des organisations n’est pas une tâche facile. Il faut développer une nouvelle philosophie de gestion des ressources humaines, adaptée aux caractéristiques de ce groupe d’âge, tout en prenant garde de ne pas indisposer les autres employés.
Dans l’industrie des TI comme dans bien d’autres secteurs, toute question liée de près ou de loin aux RH semble immanquablement ramenée à une préoccupation unique : la pénurie de main-d’oeuvre qui, déjà, pointe le bout de son nez. Et puisque l’on s’entend pour dire que l’immigration et les travailleurs extraterritoriaux ne peuvent à eux seuls constituer une solution, il faudra songer à des recours supplémentaires.
L’un deux est le recrutement des membres de la génération Y, aussi appelés echo-boomers ou post-boomers. Ces personnes sont nées entre 1980 et 1994, suivant directement la génération X (1964-79) et les baby-boomers (1946-64). À long terme, la génération Y représente l’avenir, d’où sa nécessaire intégration au monde du travail. Par contre, la rareté de la main-d’oeuvre prête un caractère d’urgence à cet inévitable aboutissement.
De ce point de vue, les TI possèdent une longueur d’avance. En effet, si le penchant de la nouvelle génération pour les causes humanitaires la pousse naturellement vers l’économie sociale, les technologies de pointe exercent aussi un attrait sur elle. La culture des TI s’harmonise bien avec les aspirations des jeunes arrivants. On pense ici à des facteurs comme la tenue vestimentaire décontractée et l’adaptation aux nouvelles technologies. La nature du travail dans le secteur des TI offre plus de souplesse, indique Tammy Erickson, spécialiste de la gestion organisationnelle et auteure du livre Workforce Crisis sur la pénurie de main-d’oeuvre.
L’industrie doit se méfier, toutefois; les post-boomers ne manifestent pas d’inclinaison pour les carrières orientées vers un secteur d’activités particulier, préférant travailler là où ils peuvent mettre à profit leurs compétences. Ainsi, les diplômés ne chercheront pas nécessairement un emploi dans leur domaine de spécialisation. Selon un site Web britannique consacré à la gestion des RH, cela est également vrai pour les spécialistes des TI.
Autres particularités de la génération Y
Dans le même ordre d’idée, les concepts classiques de développement de carrière n’ont pas de prise auprès de la génération Y. Règle générale, la qualité de vie et la famille priment sur l’avancement. Pour cette raison, sans doute, changer d’emploi ne pose pas problème. La fidélité à l’employeur devient ici une notion périmée.
Les echo-boomers préfèrent un cheminement de carrière composé d’étapes plus courtes, explique le responsable des TI d’une compagnie d’assurance établie en Pennsylvanie. Au sein de son organisation, on a commencé à structurer l’effectif de façon à permettre aux jeunes arrivants de changer de poste plus fréquemment, ce qui leur fournit l’occasion de connaître différents secteurs de l’entreprise. L’important, indique ce dirigeant, est d’établir un équilibre afin de ne pas heurter les employés plus expérimentés, habitués à d’autres façons de faire.
Pour accommoder la génération Y, beaucoup d’organisations commencent à s’éloigner des plans de carrière fondés sur l’ancienneté, commente Tammy Erickson. Ce faisant, elles accordent une plus grande importance au rendement et au potentiel, créant du coup un amalgame intéressant de compétences intergénérationnelles.
Par ailleurs, la génération Y veut un accès immédiat à ses outils de travail préférés. Messagerie instantanée, sites Web sociaux, téléphones intelligents, clés USB, lecteurs MP3, la tendance chez les post-boomers est au mode multitâche. Lors des campagnes de recrutement, il est conseillé de faire une utilisation maximale de ces outils.
Formation et sécurité
Les caractéristiques uniques de la génération Y forcent le changement. C’est le cas de la formation notamment. Ainsi, le cours magistral ne semble pas promu à un brillant avenir, les jeunes préférant l’expérience pratique. Habitués aux jeux vidéo, auxquels ils s’adonnent sans instructions écrites, les membres de la nouvelle génération sont peu enclins aux lectures imposées. Ils préfèrent apprendre électroniquement, à leur façon et à leur rythme.
Encore une fois, il importe de ne pas laisser leurs aînés en plan. Les organisations seront avisées de promouvoir la formation en ligne tout en offrant des modes d’éducation plus traditionnels. En outre, le mentorat favorisera la mixité des générations. Il y a bien sûr la formule courante, où un employé expérimenté accompagne un collègue plus jeune, mais le contraire est également vrai. Cette approche symétrique permet de tirer profit des compétences et des connaissances de chaque génération.
Par ailleurs, l’introduction sur le marché du travail des technologies privilégiées par les post-boomers peut sans doute se traduire par une productivité et une efficacité accrues. Parallèlement, toutefois, elle donne lieu à de nouvelles préoccupations en matière de sécurité. Le premier réflexe du gestionnaire sera sans doute de proscrire les outils jugés risqués. Après tout, 40 % de la navigation sur Internet au travail n’est pas liée à ce dernier. La prudence est de mise tout de même, car une coercition trop sévère peut entraîner une baisse de productivité et compromettre la capacité d’une entreprise à attirer les meilleures ressources.
Dans ce contexte, des mesures de sécurité fermes et clairement énoncées deviennent primordiales. Une telle politique devrait fortement s’inspirer de la culture organisationnelle, et s’adapter le plus efficacement possible aux habitudes de l’entreprise et des employés. On ne saurait trop insister sur l’importance de marteler auprès du personnel les mesures en vigueur. Pour s’en convaincre, il suffit de considérer les conclusions d’un récent sondage de la firme Senforce, spécialisée en sécurité de l’information : 73 % des participants avouent stocker des données d’entreprise sur des dispositifs mobiles, et 46 % d’entre eux affirment ne pas savoir si leur organisation a mis en place une politique de sécurité pour protéger ces informations.
Tout est question d’équilibre, en somme. Bien sûr, le succès du secteur des TI passe par le recrutement des echo-boomers. Dans les emplois qu’on leur offre, ceux-ci recherchent l’occasion de vivre une vie riche et bien remplie. Les entreprises ont à s’adapter à cette nouvelle donne. Par contre, la gestion générale du personnel doit conduire à la coexistence harmonieuse des générations au sein de l’organisation.
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