CHRONIQUEUR INVITÉ – Il n’y a pas si longtemps, les progiciels de gestion intégrée (PGI) étaient forcément commercialisés sous licence propriétaire et très coûteux, ce qui en limitait l’usage aux grandes entreprises. Leurs fonctions de centralisation et d’intégration élevée des données corporatives allaient de pair avec le mode de développement centralisé d’éditeurs travaillant en vase clos.
Aujourd’hui, l’économie est en pleine mutation. La croissance du Québec repose en grande partie sur ses PME et les technologies ouvertes sont devenues matures. Il devient donc nécessaire de réévaluer nos conceptions des systèmes de gestion intégrée à la lumière de ces nouvelles réalités.
Odoo, notamment, est une plate-forme d’applications d’affaires intégrée développée par un éditeur belge dont l’ancienne raison sociale (OpenERP) vous est peut-être plus familière. Ce progiciel sous licence AGPL (Affero General Public License) a suscité l’émergence d’une véritable communauté d’utilisateurs au Québec et dans le monde entier, appuyée par un écosystème local d’intégrateurs spécialisés.
Parmi les avantages notables d’un PGI à code ouvert, notons tout d’abord la disponibilité et l’accessibilité totale. N’importe quel professionnel de l’informatique peut en effet étudier son code et télécharger les exécutables permettant de l’installer. Contrairement à l’approche propriétaire, il peut en évaluer la qualité et les fonctionnalités sans débourser un sou ni subir le discours d’un vendeur ou se commettre auprès d’un consultant fonctionnel.
Si la solution l’intéresse, notre professionnel peut la mettre en œuvre seul, comme un grand, en s’appuyant sur les forums et le bon vouloir de la communauté en ligne et des groupes d’utilisateurs tels que Odoo Montréal ou Odoo Québec. S’il en est à sa première expérience – et a fortiori s’il ne s’agit pas de son cœur de métier – il préférera se faire accompagner par un spécialiste connaissant la solution, l’ayant déployée dans différents contextes, garantissant un haut niveau de qualité et qui, bien positionné dans l’écosystème du logiciel, saura trouver et implanter rapidement les meilleures solutions.
Au bout d’un mois, grâce aux méthodes agiles permettant de fournir au client ce dont il a besoin dans une perspective de planification très courte, le système de base sera déployé, les principaux modules personnalisés et fonctionnels, les employés formés et déjà au travail. On raffinera ensuite, par itérations précises, dans une totale maîtrise des coûts.
Avec l’approche propriétaire, le chargé de projet suivra un processus de production en chaîne rôdé sur des centaines de cas et le client, comme dans Les temps modernes de Chaplin, en ressortira au bout de plusieurs mois avec une application « mur à mur » rigide et coûteuse. Il aura droit, c’est vrai, à une formation complète et a une série de manuels détaillés, mais parlez-en avec vos employés : un logiciel qui s’accompagne d’une grosse documentation est aujourd’hui un logiciel mal conçu.
Un progiciel moderne et intuitif comme Odoo ne se démarque pas par l’arbitraire et la complexité, mais par la clarté d’interfaces et de processus fondés selon les meilleures pratiques. Sa courbe d’apprentissage est minime et c’est exactement ce que souhaitent la plupart des gens.
Par ailleurs, malgré des milliards de revenus récurrents, les PGI propriétaires sont basés sur des piles de technologies souvent anciennes, développées et maintenues en circuit fermé. Dans un système ouvert, lui-même basé sur des technologies ouvertes et en constante évolution, il est beaucoup plus facile de remplacer un composant par un autre dès qu’une meilleure fonctionnalité est disponible. On ne réinvente pas la roue, on s’en sert. C’est ainsi qu’à long terme, les technologies ouvertes sont et seront toujours plus innovantes que leurs équivalentes propriétaires.
Quand on y réfléchit, la logique du progiciel de gestion agile et ouvert correspond parfaitement à celle de l’entreprise réactive et ouverte d’aujourd’hui et demain. Dans les deux cas, toutes les composantes doivent interagir avec la précision et la rapidité des cinq doigts de la main.
Certaines PME pensent améliorer leurs productivité en achetant une série de produits-boîtes optimisés pour fonctionner en silo mais rien ne garantit que l’ensemble fonctionnera de façon optimale. Cette logique est celle des entreprises industrielles du XXe siècle. Elle a encore sa raison d’être mais, de plus en plus obsolète, est vouée à disparaître.
Les grands éditeurs propriétaires le savent bien. Ils ont déjà commencé une lente intégration des méthodes et des procédés ouverts mais celle-ci sera longue et pénible étant donné les enjeux de culture, d’organisation et de trésorerie que cela représente. Pourquoi diable les entreprises québécoises devraient-elles en faire les frais?