Pour la première fois, le gouvernement a présenté un projet de règlement visant à établir des critères précis pour la mise en œuvre du projet de loi C-18, jusqu’à présent entaché d’incertitudes.
Dans le cadre du règlement proposé, le gouvernement a créé une formule qui permettrait à Meta et Google de reverser quatre pour cent de leurs revenus annuels de recherche au Canada aux médias d’information canadiens.
Les représentants du gouvernement ont précisé aux médias que la contribution de Google s’élèverait à 172 millions de dollars canadiens et celle de Meta à 62 millions de dollars, pour un total de 234 millions de dollars canadiens.
L’intention, a déclaré le gouvernement, est « d’assurer une contribution significative à la durabilité du marché canadien de l’information, tout en offrant aux plateformes un degré suffisant de certitude commerciale ».
Le gouvernement estime que le calcul permettra d’obtenir une contribution correspondant à 20 pour cent des revenus des journalistes à temps plein travaillant dans une agence de presse canadienne.
Les montants finaux des compensations dépendraient des négociations entre les plateformes et les entreprises de presse, mais le calcul fournit des critères selon lesquels les discussions auraient lieu.
Michael Geist, professeur de droit de l’Internet à l’Université d’Ottawa, affirme que les quatre pour cent sont « choisis à partir de rien » et « seraient utilisés par d’autres pays comme minimum global pour des paiements similaires ».
Il a ajouté : « Aucun pays au monde n’a réussi à établir cette norme et la question à laquelle les sociétés Internet seront confrontées est de savoir si elles sont à l’aise avec la responsabilité mondiale qui verrait de nombreux autres pays formuler des exigences similaires. »
Meta, en fait, n’est toujours pas convaincue par la dernière décision de Patrimoine canadien. La responsable des politiques publiques, Rachel Curran, a soutenu : « Comme la législation repose sur l’affirmation erronée selon laquelle Meta bénéficie injustement du contenu d’actualité partagé sur nos plateformes, les réglementations proposées aujourd’hui n’auront pas d’impact sur notre décision commerciale de mettre fin à la disponibilité des informations au Canada. »
Le porte-parole de Google, Shay Purdy, a quant à lui déclaré que l’entreprise « examine les réglementations proposées pour évaluer si elles résolvent les graves problèmes structurels de la loi C-18 qui, malheureusement, n’ont pas été résolus au cours du processus législatif ».
Si Google et Meta veulent être exemptées du processus de négociation prescrit par la loi, le CRTC devra déterminer, entre autres facteurs, si elles ont déjà conclu des ententes prévoyant une rémunération équitable pour les entreprises de presse, préservant l’indépendance journalistique, contribuant à la durabilité du marché canadien de l’information, le soutien aux entreprises de presse autochtones et bien plus encore.
Les entreprises seraient également en mesure de satisfaire aux critères d’exemption avec une compensation non monétaire, qui, selon les responsables, pourrait inclure de la formation et de la publicité.
Le projet de règlement exige également que les plateformes numériques informent le CRTC, dans un délai de 30 jours, que la législation s’applique à elles, l’intention étant « d’inclure dans le régime réglementaire les opérateurs numériques les plus importants qui ont un déséquilibre de pouvoir de négociation important avec les entreprises de presse. »
En vertu du règlement proposé, si une plateforme numérique génère un chiffre d’affaires mondial total d’au moins 1 milliard de dollars au cours d’une année civile, exploite un moteur de recherche ou un marché de médias sociaux distribuant des nouvelles au Canada et compte 20 millions de visiteurs uniques mensuels canadiens moyens ou plus, elle relève de la législation.
Jusqu’à présent, seuls Facebook de Meta et Google répondent à ces critères, bien que les responsables aient déclaré aux médias que Bing de Microsoft était le deuxième plus proche de répondre à ces critères.
Instagram et Threads de Meta ne seraient pas soumis à la législation en vertu de ces nouvelles exigences. Mais l’entreprise a déjà commencé à bloquer les actualités de millions d’utilisateurs sur Instagram et Facebook.
Le projet de règlement est ouvert à la consultation publique pendant une période de 30 jours. Les entreprises, les universitaires, la société civile et tous les Canadiens peuvent soumettre leurs commentaires, après quoi le règlement final sera publié dans la Gazette du Canada, liant le CRTC à sa mise en œuvre de la Loi.
Adaptation et traduction française par Renaud Larue-Langlois.