J’ai chez moi deux Mac et un PC, des ordis de production avec trois versions différentes de la Creative Suite d’Adobe. Tout mettre ce bazar à niveau me coûterait possiblement une fortune. Dans un tel cas, le Creative Cloud ne serait-il pas une solution sur mesure pour moi?
Dès après-demain, ce vendredi 11 mai, le Creative Cloud d’Adobe sera officiellement ouvert aux amateurs de sensations fortes en production multimédia. Nouvelle choc lors du lancement de la Creative Suite 6 (1) survenue le 23 avril dernier, ce nouveau Nuage entend devenir « LA » modalité principale d’acquisition des logiciels Adobe ainsi qu’un centre de prestations de certains services associés. Génial, mais qui s’en trouve gagnant : Adobe ou l’utilisateur?
Voyons voir. Moyennant abonnement, il devient possible de se procurer n’importe quel logiciel Adobe de la Master Collection (le coffret haut de gamme) avec droit d’utilisation sur deux postes de travail, Mac ou PC, indifféremment. On parle ici d’un arsenal fabuleux de produits merveilleux : Photoshop Extended, Illustrator, InDesign, Flash Professional, Flash Builder 4.6 Premium Edition, Dreamweaver, Fireworks, Premiere Pro, After Effects, Acrobat X Pro for Creative Suite, Bridge, Audition, SpeedGrade, Prelude, Encore et Media Encoder. Il existe trois autres coffrets, soit Design Standard, Design & Web Premium et Production Premium (cliquer ici pour les détails).
Mais rare sont les professionnels qui auront besoin de tous ces produits, à plus forte raison que la Master Collection est vendue normalement 2 500 dollars américains, ce qui n’est pas à la portée de toutes les bourses. Jusqu’ici, cela représentait néanmoins une « aubaine » puisque l’achat individuel de ses composantes pouvait s’avérer onéreux. Par exemple, le prix de détail suggéré de Photoshop CS6 est de 699 dollars américains. D’où l’offre infonuagique.
Grosso modo, on a deux possibilités de départ selon que la souscription est mensuelle (on peut quitter n’importe quand) ou annuelle (on signe un contrat qui engage pour un an). Dans ce dernier cas, elle est de 50 dollars américains pas mois, soit 600 dollars américains par année, pour un individu ou de 70 dollars américains par mois, soit 840 dollars américains par année, pour un groupe.
Dans l’autre, elle est de 75 dollars américains pas mois, c’est-à-dire 900 dollars américains par année et il n’y a pas de forfait pour les groupes. De plus, le monde éducationnel, celui des étudiants et des enseignants, est privilégié avec un tarif de 30 dollars américains par mois (360 dollars américains par année) pour les individus ou de 40 dollars américains par mois (480 dollars américains par année) pour les groupes, dans le cadre exclusif d’une souscription annuelle.
La même logique vaut pour un certain nombre de produits CS6 individuels. Par exemple, on peut ne vouloir que Photoshop ou InDesign ou Illustrator. Auquel cas, les droits d’utilisation seront de 20 dollars américains ou de 30 dollars américains par mois, pour chacun, selon la nature de la souscription. On constate ainsi qu’à partir de trois logiciels, il devient plus avantageux de s’abonner à « la totale ».
Les avantages sont nombreux. Ainsi, l’utilisateur peut compter sur les versions les plus récentes de ses logiciels Adobe, qu’il soit sur Mac ou sur PC. Il n’a plus à se casser la tête avec les mises à jour ou à niveau. Il n’a plus à installer une lourde ribambelle de fichiers nécessaires au bon fonctionnement du coffret (p. ex. quelque 8 Go d’espace dans le cas du « petit » coffret Design Standard. Il ne se procure désormais que ce dont il a besoin.
Mais économise-t-il? La première Creative Suite (elle n’avait pas de numéro) est apparue en septembre 2003 et la plus récente, il y a quinze jours. On parle donc de sept versions (incluant la 5.5) en huit ans et demi. Livrons-nous à une comparaison boiteuse destinée simplement à donner une idée de grandeur.
Supposons que j’aie acheté Photoshop en 2003 (environ 500 dollars, ce qui semble une moyenne réaliste, les prix fluctuant selon leurs sources) et que de CS en CS, je l’aie toujours mis à niveau (ce que plusieurs graphistes font) au prix conservateur de 200 $ à chaque fois. J’aurais alors défrayé 1 200 dollars (200 dollars x 6 mises à niveau) en plus du 500 dollars initial, soit un total de 1 700 dollars pour 8 ? ans (102 mois) de Photoshop. Avoir eu en 2003 un Creative Cloud avec possibilité d’utiliser Photoshop moyennant un contrat annuel à 20 dollars américains par mois, cette durée d’utilisation aurait coûté 102 x 20 dollars, soit 2 040 dollars américains, ce qui est 300 dollars plus cher.
Imaginons maintenant que j’ai acheté l’édition de base de la Creative Suite à sa sortie en 2003 et que par la suite, je l’aie religieusement mise à niveau. Établissons à 1200 dollars américains le coût initial d’achat et à 275 dollars américains le coût des mises à niveau. Arrivé à la CS6, je me trouve à avoir dépensé 1 650 dollars américains (275 dollars américains x 6) ce qui, avec l’achat initial, totalise 2 850 dollars américains. Si j’avais eu accès au Creative Cloud, j’aurais payé 50 dollars par mois pendant 102 mois, soit 5 100 dollars, ce qui semblerait être deux fois plus cher ou presque.
Autrement dit, la simplicité, la quiétude et la propreté du nuage « adobesque » a un prix, celui du tracas qui est disparu. On peut parler de la surprime du gros ronron fiable.
En fait, j’y vois surtout un avantage considérable pour la fabricante californienne. Pirater du logiciel géré en mode infonuagique requiert un niveau d’expertise différent de celui auquel nous ont habitués les Warrez jusqu’ici.
Par exemple, jusqu’à sa version 7, Final Cut Pro (Apple) circulait abondement en version contrefaite. Mais avec FinalCut Pro X, cela n’est plus possible. On se procure désormais ce logiciel seulement à partir de la boutique en ligne d’Apple où il faut avoir un compte et une carte de crédit respectée. C’est exactement comme une app de iPhone. Le système sait qui on est, quelles machines on a et dans lesquelles on installe ce qu’on vient d’acheter. On ne peut en faire de copie à l’attention de beau-frère.
Ainsi, le fabricant n’a plus à gérer de numéros de série, de clés de produits, etc. Ça se passe autrement; chaque exemplaire vendu est identifié à un utilisateur connu par lui. D’où les difficultés de piratage. Considérant la masse fabuleuse de revenus que l’industrie perd chaque année en raison de la contrefaçon, on peut en déduire que le Creative Cloud d’Adobe sera, de par sa nature, une source majeure de nouveaux revenus.
Tout cela étant dit, téléchargez les versions d’essai de vos produits Adobe de prédilection ( par exemple). Leur durée est de 30 jours, ce qui vous convaincra sûrement que la fournée CS6 est remarquable.
(1) À chaque lancement de Creative Suite, j’écris invariablement que cette version est plus rapide, complète et agréable que la précédente. Bis repetita placent.
Pour consulter l’édition numérique du magazine d’avril 2012 de Direction informatique, cliquez ici
Nelson Dumais est journaliste indépendant, spécialisé en technologies de l’information depuis plus de 20 ans.