L’impartiteur américain IQT Solutions ferme sans préavis ses bureaux au Canada, dont deux étaient situés au Québec. 1 200 personnes perdent leur emploi, sans recevoir de salaire ni d’indemnité. Explication des causes possibles et bilan des réactions.
Le 15 juillet, soit vendredi dernier, IQT solutions, un impartiteur américain de service de centre d’appel, a mis fin aux activités de ses trois bureaux en sol canadien abruptement et sans avertissement.
1 200 personnes qui travaillaient dans ces bureaux qui étaient situés à Laval et à Trois-Rivières au Québec, ainsi qu’à Oshawa en Ontario, ont été contraintes à vider rapidement leurs cubicules sous la surveillance de policiers. Cette fermeture a été qualifiée par plusieurs de « sauvage » et « d’inacceptable ».
Selon les commentaires émis par d’anciens employés de IQT Solutions, le licenciement massif a eu lieu un jour de paie et aucun salaire n’aurait été versé pour les deux dernières semaines de travail. Également, ces employés n’auraient pas reçu d’indemnité de cessation d’emploi.
Au moment de mettre en ligne, le site Web de IQT Solutions n’était pas accessible sur la Toile.
Raisons entrepreneuriales, syndicales ou contractuelles?
Selon les informations qui ont été publiées en ligne par des médias, une organisation syndicale et des internautes, trois événements pourraient expliquer la fin subite des activités de IQT Solutions.
D’une part, l’entreprise IQT Solutions aurait reçu au cours des derniers mois une offre de transfert de ses activités de la part d’une municipalité aux États-Unis. Ainsi, l’entreprise aurait carrément cessé ses activités au Canada.
Également, les employés d’un des bureaux de IQT au Québec, soit celui de Trois-Rivières, avaient reçu leur accréditation syndicale au cours des derniers jours.
Dans un communiqué qui a été publié le 16 juillet, le Syndicat des Métallos, qui est affilié à la Fédération des travailleurs du Québec, indique que les 140 employés du centre d’appel de Trois-Rivières avaient obtenu leur accréditation syndicale le mardi 12 juillet.
Le communiqué du syndicat affirme que IQT Solutions a déménagé récemment ses activités à Nashville au Tennessee, à la suite de l’obtention d’une subvention de démarrage et de subventions qui seraient liées à la création d’emplois.
« Ici, ce n’est pas le Far West, il y a des lois à respecter! », déclare Daniel Roy, le directeur québécois des Métallos, en affirmant que le syndicat amorçait des démarches légales afin d’assurer que les travailleurs reçoivent les sommes qui leur sont dues. M. Roy ajoute que des démarches syndicales seront entreprises afin d’informer de la situation le syndicat américain United Steelworkers, auquel le syndicat des Métallos est affilié.
D’autre part, IQT Solutions aurait demandé la protection des tribunaux contre ses créanciers, mais il semble y avoir une confusion quant au déroulement des événements qui impliquerait son unique client, soit le fournisseur de services de télécommunications Bell Canada.
Dans le portail Durhamregion.com, qui est lié à divers médias de la région d’Oshawa en Ontario, un article cite d’ex-employés de IQT Solutions qui auraient déclaré que la mise en faillite de l’impartiteur a forcé Bell Canada à mettre fin à son contrat. L’article cite aussi un porte-parole de Bell Canada, qui indique que l’entreprise ne commentera pas la fermeture de IQT Solutions.
Toutefois, un article publié dans le portail de Radio-Canada évoque les propos d’un ancien employé du bureau de Trois-Rivières, qui aurait déclaré que l’entreprise a cessé ses activités en raison de la perte du contrat avec Bell Canada. Selon cet employé, IQT Solutions effectuait le soutien technique et le service à la clientèle pour le service Internet de Bell Canada.
Cet article indique que le centre d’appel qui était situé à Laval avait été acquis par IQT Solutions en 2009 de l’entreprise Expertel, qui aurait reçu des subventions et des garanties de prêt de la part d’Investissement Québec dans les années 2000.
Réactions dans la Toile
Le site Web RateMyEmployer.ca, qui est consacré à l’évaluation anonyme d’employeurs au Canada, contient une dizaine d’évaluations peu flatteuses de l’entreprise IQT Solutions qui ont été produites entre le 2 mai 2010 et le 10 juin 2011. Ces évaluations anonymes, rédigées en anglais ou en français, font état de bas salaires, de conditions de travail difficiles et d’un haut taux de roulement du personnel.
Depuis le 15 juillet, une douzaine d’évaluations ont été ajoutées par des employés irrités – et par de mauvais plaisantins – auxquels ont été ajoutés quelques commentaires plus ou moins pertinents.
Dans le portail YouTube, on peut voir un enregistrement vidéo d’une réunion d’anciens employés de IQT Solutions à Trois-Rivières qui a été tenue devant les locaux de l’entreprise le samedi 16 juillet dernier.
On y voit notamment Robert Aubin, le député du Nouveau Parti Démocratique dans le comté de Trois-Rivières, qui déclare que « des batailles se feront au cours des prochains jours ou des prochaines semaines à différents niveaux », en indiquant cette fermeture qui est « aux antipodes de ce que prévoit le Code du travail » au Québec.
En politique provinciale, des politiciens faisant partie du gouvernement et de l’opposition ont indiqué au cours de la fin de semaine dernière qu’ils étudieraient le dossier au cours des prochains jours afin d’évaluer les recours possibles afin d’aider les ex-employés lésés.
Par ailleurs, on peut voir dans YouTube des vidéos impliquant le bureau de IQT Solutions de Trois-Rivières qui ont été publiées au cours des dernières années, dont un reportage d’une station de télévision du réseau TVA dans le cadre d’une pandémie de grippe, ainsi qu’une capsule publicitaire des centres de développement local de la Mauricie.
On peut aussi voir dans YouTube un commentaire vidéo de l’usager « SecularOpinion » qui exprime dans un langage cru son mécontentement envers IQT Solutions, où travaillait sa copine.
Impartition… en interne?
Un article publié par le quotidien montréalais The Gazette, en référant à des sources non identifiées, évoque une rumeur voulant que l’exploitant de centre d’appels en impartition Nordia de Québec ait obtenu un mandat de la part de Bell Canada.
Selon une page Web du site de Nordia qui est accessible par le biais du moteur de recherche Google, cette entreprise fondée en avril 1999 est une coentreprise qui appartient au fournisseur de télécommunications Bell Canada et à Excell Global Services, un impartiteur américain de centres d’appels. Nordia exploite des centres d’appels à Québec et à Sherbrooke, ainsi qu’à Kitchener en Ontario et Nanaimo en Colombie-Britannique.
Par ailleurs, Nordia annonce l’acceptation de candidatures dans le cadre l’ouverture prochaine d’un centre d’appels à Laval qui sera dédié au soutien pour les services de téléphonie résidentielle et d’Internet. L’entreprise indique ainsi qu’elle réalisera des séances de formation à compter du mois d’août prochain.
À lire dans ce dossier : Avortement probable du transfert d’IQT Solutions aux États-Unis (19 juillet 2011) Abandon du projet entre IQT Solutions et Nashville (19 juillet 2011) IQT Solutions : Investissement Québec réclame le remboursement d’une subvention indirecte (21 juillet 2011) IQT Solutions : À propos d’Expertel et de Centre de Contact Durham (21 juillet 2011)
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Jean-François Ferland est rédacteur en chef adjoint au magazine Direction informatique.