Le cycle de vie des TIC ne cesse de raccourcir et les changements en cours d’exploitation se multiplient. Combien de temps une personne ou une organisation bénéficie-t-elle d’une productivité optimale?
Salut Gaétan…
Indéniablement, les technologies de l’information et des communications sont pratiques, voire essentielles à la réalisation de tâches personnelles et professionnelles. Chaque année, depuis cinquante ans dans le cas des grandes organisations et depuis environ trente ans dans le cas des particuliers, un nouveau produit, un nouveau logiciel, un service ou un procédé technologique contribue à procurer une fameuse valeur ajoutée.
Dans certains cas, l’adoption de ces nouveautés se fait rapidement : on se procure le produit, on en lit les instructions, on en fait l’essai et hop! on l’utilise. Généralement, c’est l’individu qui est en mesure de négocier rapidement la courbe d’apprentissage, bien que le personnel d’une organisation soit aussi apte à adopter aussi rapidement une technologie si elle est très simple à utiliser.
Toutefois, lorsque le degré de complexité d’une technologie est plus élevé ou que les changements apportés à une application sont considérables, le temps écoulé entre le contact initial et l’atteinte d’une vitesse de croisière appréciable peut être considérablement plus long. Plus le changement sera majeur sur les processus habituels de travail d’une organisation, plus il faudra de temps pour s’adapter.
Également, il est probable que le niveau de résistance des individus par méfiance de l’inconnu sera plus ou moins élevé selon la technologie, ce qui nécessitera de la sensibilisation et de la formation. De plus, des modifications et des correctifs pourront être requis pour assurer le fonctionnement ou l’intégration de la technologie.
Bref, une organisation devra accorder du temps et de l’argent à la préparation du projet et à l’implantation du nouvel actif technologique, mais elle devra aussi envisager un certain temps d’adaptation avant que tout le monde s’habitue au nouvel élément de travail, retrouve sa vitesse de croisière et génère soit un gain de productivité ou d’efficacité, soit une économie de temps et d’argent.
Considérons qu’il faudra attribuer un certain laps temps de gain ou d’économie à un « rattrapage » de productivité perdue lors de la formation, de la transition et de l’adaptation à la nouvelle technologie. Dès que le temps de compensation sera écoulé, enfin, l’organisation obtiendra sa fameuse valeur ajoutée!
Un projet peut prendre des semaines, voire des mois ou des années, du moment où le sujet est abordé pour une première fois jusqu’à l’obtention d’un premier gain net. Heureusement, pense-t-on, l’organisation pourra travailler efficacement pour plusieurs années sans être distraite. Les organisations, généralement, aiment la stabilité. Lorsqu’une technologie est implantée, elle fera partie du portfolio des outils pour une longue période de temps, jusqu’à ce qu’elle ait été « usée à la corde. »
Or, les éditeurs et les fabricants du domaine des TIC, qui développent de nouveaux produits et services, souhaitent que les organisations adoptent le plus tôt possible la nouvelle mouture du fruit de leurs labeurs. Ainsi, certains vont appliquer une « date d’expiration » à la vente du produit, mais surtout à son soutien technique.
À partir de telle journée, non seulement des rustines ne seront plus disponibles pour corriger des failles possibles, mais tout le contenu de soutien en ligne ou par téléphone disparaîtra. Dorénavant, seul le nouveau produit sera soutenu. L’organisation doit alors remplacer le produit exploité par la nouvelle mouture, sinon elle risque d’être prise au dépourvu si un pépin survient.
De plus, si ce n’est pas une composante principale qui doit être remplacée, comme un système d’exploitation, il se peut que ce soit un important logiciel qui ne fonctionnera que sur la dernière version d’un SE, ce qui aura pour effet de doubler l’ampleur du projet et du changement au sein de l’organisation.
« Mais la technologie fonctionne parfaitement! Nous n’avons pas besoin des nouvelles fonctions! Nous commençons à peine à bénéficier de notre retour sur investissement! » diront les organisations. Malgré de tels arguments valables, ces organisations n’auront d’autre choix que de se plier à cette exigence des fournisseurs qui est dictée par des intérêts commerciaux.
Certes, des alternatives ont fait émergence au cours des dernières années, où l’on promet une plus grande liberté et une plus grande flexibilité d’exploitation d’une technologie. Le problème, considèrent les organisations, est l’ampleur du changement que nécessitera le recours à une alternative. Si les clients d’un restaurant sont déboussolés dans leurs habitudes lorsque la pancarte du menu sur le mur est remplacée par une nouvelle version, il en est tout autant des employés d’une organisation qui voient l’apparence de leur application être modifiée ne serait-ce que légèrement.
Il y a également toute une série d’autres éléments à considérer qui, précisons-le, ne font pas en sorte que l’alternative technologique n’est pas valable, mais plutôt que la courbe d’apprentissage et l’adaptation au changement seront plus prononcées. Nouvelle version d’un produit connu ou nouveau produit? Telle est la question…
Certes, les personnes finissent par s’adapter. Toutefois, pour plusieurs organisations, l’augmentation de la cadence de remplacement des technologies en vient à être coûteuse en temps, en argent et en productivité. Comme la période de gain net de productivité en vient à se rétrécir, tout comme celle de l’amortissement de l’investissement monétaire qu’implique le recours à la technologie, les organisations sont aux prises avec un dilemme : doivent-elles attendre au dernier moment de la disponibilité de la version précédente d’un produit pour en faire l’acquisition, question de rentabiliser le produit actuellement utilisé, ou doivent-elles acheter dès maintenant la nouvelle version du produit afin d’en maximiser l’investissement sur tout son cycle de vie?
« Si ce n’est pas brisé, pourquoi le réparer? », dit une expression connue. Pour bien des organisations, quand il est question des TIC, il s’agit d’une question à (beaucoup plus que) 64 000 $…
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Gaétan Martel, 1958 – 2008
C’est avec stupéfaction que nous avons appris le décès de Gaétan Martel la semaine dernière. Il était âgé de cinquante ans.
Gaétan a été pendant plus de dix ans le rédacteur en chef de Québec Micro, l’un des magazines francophones grand public d’informatique les plus populaires de son époque. Avant que le blogue ne soit populaire, Gaétan était déjà un amateur de conversation avec ses lecteurs, un style qu’il aimait bien utiliser dans ses éditoriaux; en voici un exemple.
Depuis quelque temps, Gaétan oeuvrait à la formation du personnel d’une grande institution québécoise pour le compte d’un fournisseur de services-conseils.
Gaétan était connu à titre de spécialiste des technologies de l’information par le public, mais aussi comme ami par bon nombre de collègues de la profession. Son intégrité, sa passion et son sourire étaient incomparables, tout comme sa passion pour la culture japonaise. Son départ a attristé l’équipe de Direction informatique, qui transmet ses condoléances à son épouse, à sa famille et à ses amis.
Arigato gozaimasu (merci beaucoup), Gaétan.
Jean-François Ferland est journaliste au magazine Direction informatique.