Selon des conseillers en mise en marché Internet, les PME québécoises sont encore loin de s’intéresser aux technologies du Web 2.0. Pendant ce temps, une enquête indique qu’au sud de la frontière, ce serait plutôt le contraire.
La prochaine grande occasion d’affaires en TI proviendra du Web 2.0. La transition du téléphone et des courriels vers la collaboration permettra d’accomplir des choses auxquelles on n’a pu que rêver jusqu’à maintenant. Structure organisationnelle, productivité, gestion des soins de santé, communications personnelles, les changements affecteront la vie en général. Voilà du moins l’opinion exprimée par le pdg de Cisco ce printemps devant un parterre de partenaires commerciaux.
Nombre de dirigeants d’entreprise manifestent semblable point de vue. Un sondage réalisé l’année dernière par une revue spécialisée en TI (voir ici) révèle qu’un pourcentage appréciable de répondants juge ces technologies fort prometteuses. Les principaux avantages potentiels alors cités sont les économies provenant de la réduction des logiciels propriétaires et de la simplification de l’infrastructure, un accès plus facile aux applications stratégiques et un service à la clientèle amélioré.
Bien entendu, les grandes entreprises ont été les premières à exploiter les promesses du Web 2.0. Le conseiller en marketing Internet, Michel Leblanc, cite les exemples du secteur bancaire canadien, ainsi que de Canoë, Radio-Canada et Yahoo Québec. Les PME en ont aussi les moyens, toutefois. Pour Martin Lessard, consultant stratégique Web, ces nouvelles technologies « sont tout à fait accessibles à la petite et moyenne entreprise ». Elles peuvent lui permettre de développer des canaux de commercialisation à peu de frais et de rejoindre facilement son public cible.
Pourtant, les exemples de PME québécoises embrassant le Web 2.0 se font rares. Il y a bien des utilisateurs de blogues – des travailleurs autonomes particulièrement, précise Martin Lessard – mais de façon générale, le Web 2.0 est boudé par nos petites entreprises. Pour Michel Leblanc, elles en sont encore à établir une présence efficace sur le « Web 1.0 ».
La PME québécoise accuse-t-elle un retard si grand?
Un son de cloche bien différent nous parvient des États-Unis. La firme AMI-Partners, qui se spécialise en information commerciale sur les petites et moyennes entreprises, a publié en mars dernier les résultats d’une étude sur le sujet. Selon ce sondage, les PME américaines font appel aux technologies du Web 2.0 dans une proportion de 40 %, ce qui représente un total de 2,8 millions d’organisations. La firme précise toutefois que la sensibilisation au phénomène demeure faible, certaines entreprises utilisant ces technologies sans savoir qu’il s’agit du Web 2.0.
Ce sondage a de quoi étonner. Comment expliquer alors le retard que semble avoir pris la PME québécoise? Tout dépend de la définition que l’on utilise du Web 2.0, suggère Michel Leblanc. Il est vrai que le sujet a fait l’objet de nombreuses interprétations, et AMI-Partners décrit le concept ainsi : la deuxième génération de services Internet, qui se distingue par la transition de sites Web statiques vers une plateforme permettant le développement d’applications et engendrant de nouvelles façons de commercialiser de nouvelles applications (voir ce communiqué). Si cette définition est plutôt générale, peut-elle tout de même expliquer à elle seule le fossé qui semble s’être creusé de part et d’autre de la frontière?
D’une certaine façon, le Web 2.0, c’est le Web actuel, avance Martin Lessard. En effet, si l’on parle de l’utilisation par les PME du Web tel qu’il est aujourd’hui, on peut arriver à des résultats élevés. Autre explication suggérée : le contexte socio-économique du Québec. Ce n’est pas en français que le Web s’est d’abord construit, dit Michel Leblanc, et l’innovation continue de venir principalement du monde anglo-saxon.
Ce qui soulève une question : au-delà de la volonté d’adopter ces technologies, les organisations québécoises ont-elles les ressources permettant de le faire efficacement? En effet, le Web 2.0 reposant fortement sur la participation et l’effet de réseau, le Québec a-t-il la masse critique permettant d’exploiter ces facteurs à fond? Martin Lessard en doute. Par contre, ce levier existe certainement dans l’ensemble du marché de la francophonie. Et pour les organisations ambitieuses, dont les produits et les services s’y prêtent, pourquoi pas dans le monde entier?
Un important travail de conscientisation et de vulgarisation reste à faire, croit Michel Leblanc. Et de ce point de vue, les gouvernements doivent tracer la voie par leur exemple, dit-il. En attendant, des pistes de réflexion s’offrent aux organisations québécoises. Parmi les technologies qui, d’après l’étude d’AMI-Partners, pourraient contribuer le plus à une utilisation accrue du Web 2.0 dans les PME, on retrouve le logiciel-service, la webdiffusion, le blogue, la technologie de communication Skype, les communautés en ligne et les portails. On pourrait facilement ajouter le wiki à cette liste. Toujours selon cette étude, des secteurs se profilent où la croissance du concept pourrait être robuste, notamment le stockage, la sauvegarde, la gestion des relations avec la clientèle et les outils de productivité.