Midori : prénom féminin? Couleur verte? Navigateur Web? Le successeur de Windows de Microsoft?
Si vous tapez le mot « Midori » dans Google, vous allez d’abord vous faire référer à un breuvage alcoolisé au melon, au site de la violoniste Midori Ito, à une fiche Wikipedia sur un navigateur Web et au miniportail d’une artiste érotique californienne. Puis, en continuant, vous allez découvrir les sociétés Midori Ribbon, Midori Tech et Midori America Corp, des boîtes n’ayant aucun rapport entre elles. Tout cela dans les deux premières pages de résultats, où seulement sept fiches décriront Midori comme étant la prochaine grande mouture du système d’exploitation (SE) de Microsoft.
Cela, bien entendu, si on en croit la rumeur avalisée en juillet dernier par de hauts gradés chez Microsoft. Premier grand SE à ne pas être de tradition Windows, Midori remplacerait Windows 7 dans six ans d’ici. Pour cette raison, il en serait pour l’instant à la phase « incubation », c’est-à-dire en stade pré « alpha », ce qui signifie qu’il aurait définitivement franchi l’étape de la R&D. On dit même qu’il serait sous la responsabilité de deux vétérans, le vice-président principal Eric Rudder, un proche de Bill Gates, et Craig Mundie, dont le titre est « Chief Research and Strategy Officer ». Tout cela alors que Microsoft dépense des fortunes (de l’argent pas toujours bien placé si on en voit les résultats), pour vanter les mérites de Vista, et qu’elle travaille fébrilement au lancement des premières « bêta » de Windows 7.
L’application commerciale issue de Singularity
En fait, Midori serait l’application commerciale d’un vaste projet de recherche appelé Singularity, un prototype évolué de SE non Windows lancé en 2003 qui permettrait tout, et encore plus, à l’époque des hyperviseurs, de la virtualisation et de capacité informatique à la demande via Internet (le cloud computing). L’idée? En finir avec Windows, un SE pensé pour des machines autonomes, isolées et nanties d’un seul processeur.
Si en langue kanji, Midori signifie « vert » et qu’en pays kanji, le Japon, il constitue un prénom féminin répandu, on peut en déduire que Microsoft veut complètement changer d’approche et de rendu à l’enseigne de ses SE. Ainsi, celui de 2012 ou 2013 pourra être plus vert et plus féminin. Plus vert, dans le sens qu’il pourra ne plus forcer le remplacement des ordinateurs en place par du plus costaud, du plus énergivore, comme ce fut le cas avec Windows XP et, surtout, Windows Vista. Plus féminin, dans le sens qu’il voudra probablement s’accommoder en douceur du système en place et de la préférence de l’utilisateur, au lieu d’imposer une façon brutale de faire les choses. Ce qui signifie, si on en croit la rumeur, qu’une jeune geisha toute de vert drapée, viendra remplacer un tocson conçu il y a 25 ans appelé Windows.
Phrasé autrement, on peut imaginer que Microsoft lancera son « après Windows » dans un monde où il sera devenu banal d’accéder au net de partout, à partir d’innombrables dispositifs aussi ingénieux que variés, pour lancer une application, créer de l’information, partager des données, collaborer à un projet, échanger, s’informer et se divertir. Ce faisant, la géante entreprendra d’éliminer la symbiose dans un ordinateur entre les applications installées et le matériel. Bref, rêve-t-on dans les officines de Redmond, cette Midori sera tellement belle, cultivée, généreuse et admirable, qu’elle saura faire oublier les pires turpitudes de Windows tout en permettant au plus exigeant des utilisateurs extrêmes de faire tout ce qu’il aura envie de faire avec son ordi. Sans souffrir!
À partir de zéro
À lire l’analyse de Software Development Times, un webzine qui aurait mis la main sur des documents confidentiels de Microsoft, on apprend que s’il voit le jour, Midori sera écrit à partir de zéro (pas de vieux spaghetti des temps immémoriaux), qu’il sera rétrocompatible, c’est-à-dire qu’il saura coexister ou interopérer avec les Windows de 32 et de 64 bits, qu’il sera compartimenté en composantes aux frontières bien démarquées, cela pour des questions de sécurité.
Il sera évidemment réseaucentrique ou webcentrique (mais pas exclusivement) parce que le Net sera devenu aussi essentiel à l’informatique que l’électricité, qu’il ronronnera de ravissement quand il se retrouvera en situation d’informatique à la demande, qu’il saura fonctionner avec toutes les topologies de l’heure (p.ex. client-serveur, multiniveaux, point à point, informatique en grille sur Internet), enfin que ses applications pourront être accédées nativement sur une machine ou éparpillées sur de multiples systèmes. On parle ici de l’Asynchronous Promise Architecture (APA) où les applications utilisées peuvent provenir de machines distinctes.
Une approche flexible
Ses outils et bibliothèques de programmes seront faits en code géré (« managed code ») spécifique à la machine virtuelle du cadre d’applications Microsoft .NET (dont le « Common Language Runtime » – CLR). Il ne s’agirait plus d’un système installé sur le disque rigide, mais plutôt d’une interface web mise à jour constamment et qui pourrait être notamment disponible en location. Ce système ne dépendrait ainsi que très peu de la configuration du PC lequel pourra être de type X86, X64 ou ARM. Ce qui peut vouloir dire que l’architecture de Midori ne serait qu’asynchrone. Ce SE aimerait la concurrence de tâches (un principe fondamental) et l’utilisation en mode parallèle des ressources locales ou distribuées.
Une autre histoire de Québec uni dans un Canada fort? On verra bien assez tôt. Pour l’instant, la seule réalité mesurable est la suivante : Win XP est hors circuit depuis la fin juin, Win Vista est un SE devenu moins pertinent, dixit Steve Ballmer, et Win 7 nous sera remis en version bêta d’ici quinze jours. Après? Tout est possible, incluant Midori. Tout est possible parce que l’évolution de la « webcentricité », de la capacité informatique via Internet et de certains SE (p. ex. le Mac OS X ou Linux) peut arriver, en cinq ans, à rendre le SE de Microsoft moins essentiel. Pensons-y; tout indique qu’en 2012 ou 2013, tous les SE commenceront sérieusement à pouvoir faire la même chose, de façon directe, virtuelle ou connectée, sans que l’utilisateur ne voie de différence.
Vous voudriez être stratège chez Microsoft?
Nelson Dumais est journaliste indépendant, spécialisé en technologies de l’information depuis plus de 20 ans.