« ChatGPT est notre Netscape », prévient le PDG de Deloitte au sujet de la désillusion qui suivra après le pic d’engouement de l’IA

L’histoire a montré qu’après qu’une technologie révolutionnaire atteint le sommet de son cycle d’engouement, un « creux de désillusion » s’ensuit. La même chose est sur le point d’arriver à l’intelligence artificielle (IA), a prévenu Anthony Viel, président-directeur général de Deloitte Canada, lors de son discours lors du récent événement ALL IN à Montréal.

« ChatGPT est notre Netscape », a déclaré M. Viel, « notre “canari dans la mine de charbon”. »

Ils ont tous deux [ChatGPT et Netscape, NdT] surgi avec des promesses folles, une surexcitation et un marché haussier. Mais tout cela est tempéré lorsque la nouvelle technologie ne répond pas immédiatement à nos besoins les plus fous ou ne correspond pas à la puissance de notre imagination et de notre patience, a-t-il expliqué.

« Lorsque cela se produit, nous avons tendance à le rejeter ou à l’ignorer et à passer à autre chose », a-t-il ajouté, soulignant que nous ne pouvons pas nous laisser « distraire ou nous laisser bercer par un sentiment d’inaction ».

Les entreprises qui ont persisté, comme Amazon lors du krach d’Internet dans les années 1990, ont récolté « des récompenses énormes et historiques » et des acteurs comme Google qui ont fait surface au milieu des années 2000 ont complètement changé la donne.

« Nous ne savons pas encore à quoi ressemblera notre moment Google. Mais nous savons que ça arrive. Et je pense que cela arrive plus vite que nous ne le pensons. »

Il a fait valoir que le creux de la désillusion, qui affectera les entreprises dans tous les domaines, sera de courte durée et durera des semaines ou des mois, mais pas des années. Et c’est pendant cette période de changement technologique rapide que les dirigeants devraient s’engager non seulement à survivre, mais aussi à prospérer et à tirer parti de la nouvelle situation, a noté M. Viel.

Son discours à ALL IN intervient alors que Deloitte publie un nouveau rapport, soulignant les opportunités de l’IA, mais aussi ses nombreux risques.

Le rapport souligne qu’une proportion importante de 86 pour cent des entreprises canadiennes interrogées étaient préoccupées par les risques éthiques de l’IA.

L’inaction n’est pas une option, même face à ces risques, a souligné M. Viel.

« Ne vous y trompez pas, ces risques sont réels, mais ceux de ne rien faire le sont aussi. »

Les chefs d’entreprise, a-t-il déclaré, ont l’obligation de jeter les bases d’une IA éthique et responsable, surtout en l’absence de réglementation. En outre, ils devraient travailler avec les régulateurs, qui ont du mal à suivre le rythme de l’évolution technologique, pour accélérer les références et les limites que tous les autres doivent suivre.

Un déploiement éthique de l’IA passe également par la création d’une approche fondamentalement inclusive, a souligné M. Viel.

Le rapport de Deloitte révèle en effet que 51 % des personnes interrogées citent le potentiel de biais dans les algorithmes d’IA et/ou le potentiel de résultats de mauvaise qualité comme risques importants.

Anthony Viel a déclaré qu’il n’était pas très préoccupé par la mauvaise qualité des résultats des systèmes d’IA générative, car ils continueront de s’améliorer, mais les biais sont très préoccupants.

« Les outils d’IA générative développés naïvement ou dans le vide auront des préjugés raciaux, sexuels et autres dans leur fonctionnement, ce qui, je pense, a le potentiel de nous diviser davantage en tant que société », a déclaré M. Viel. « Maintenant, ce n’est tout simplement pas acceptable. Et nous devons faire en sorte que cela n’arrive pas. »

Dans son discours d’ouverture, M. Viel a également rejeté les inquiétudes concernant le remplacement des emplois par l’IA et a de nouveau fait référence à l’histoire.

« Cela s’est déjà produit et cela se reproduira encore, qu’il s’agisse des machines à vapeur, du télégraphe ou d’Internet, toutes ces avancées ont créé des emplois. »

Le rapport Deloitte souligne en effet que seul un quart des personnes interrogées craignent de perdre leur emploi. De plus, au cours des cinq dernières années, la cohorte canadienne de talents en IA a augmenté en moyenne de 38 pour cent par an, dépassant les États-Unis, le Royaume-Uni, l’Allemagne, la France et la Suède.

« Alors que l’IA nous conduit vers la quatrième révolution industrielle, notre objectif demeure inébranlable et à l’avant-plan de nos paroles et de nos actions », a conclu M. Viel. « Je vous appelle tous à regarder à l’intérieur. N’oubliez jamais l’héritage de ceux qui vous ont précédé, ainsi que la promesse, le but qui vous a guidé jusqu’ici aujourd’hui. En faisant cela, collectivement, nous pouvons non seulement faire partie d’une ère éthique, responsable et prospère pour le Canada et les Canadiens, mais aussi réparer les torts du passé et accélérer la construction d’un avenir meilleur pour tous. »

L’article original (en anglais) est disponible sur IT World Canada, une publication sœur de Direction informatique.

Adaptation et traduction française par Renaud Larue-Langlois.

Ashee Pamma
Ashee Pamma
Ashee est rédactrice pour IT World Canada. Elle a obtenu son diplôme en communication et études médiatiques à l'Université Carleton à Ottawa. Elle espère devenir chroniqueuse après d'autres études en journalisme. Vous pouvez lui envoyer un courriel à apamma@itwc.ca.

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