Devrais-je m’acheter un PC ou un dispositif « Post-PC » pour remplacer mon vieux quadricoeur Intel/Microsoft quand il rendra l’âme? PC? Post-PC? Vous dites une « tablette »? Mais j’aime ça les PC, moi! C’est vrai qu’ils vont disparaître, les PC? Non? Oui? À l’aide!
Steve Jobs, un homme de vision, a prophétisé deux avenues en ce qui a trait au PC. Primo, a-t-il décrété, les 30 ans d’hégémonie de l’ordinateur personnel, le X86 et le Mac, ces bêtes pantelantes fidèles au moule conçu entre 1975 à 1983, étaient révolus. L’humanité était passée, paf!, à l’ère « post-PC ». Vive les tablettes, les bidules et les tap-tap! Mais, secundo, le PC ne mourra pas. Il sera désormais à la techno ce que le camion est au monde automobile, a nuancé l’oracle de Cupertino.
En gros, les gens se serviront de dispositifs à la sauce tablette et les fournisseurs de services, de PC bien musclés. Il y aura des créateurs de contenu qui utiliseront des PC et des consommateurs de contenu qui seront heureux avec des dispositifs beaucoup plus légers et conviviaux. Il y aura des graphistes, des ingénieurs, des monteurs vidéo et tutti quanti qui auront besoin de puissance, mais il y aura surtout de braves gens qui sauront se contenter d’un non-PC finement gavé de gugusses intelligents.
Pour Jobs, cela signifie que le Macintosh grand public devra se rapprocher considérablement de la planète iPod/iPhone/iPad. Une première tentative d’aller en ce sens apparaît d’ailleurs dans la toute dernière mouture du Mac OS X, la version 10.7 (Lion). Et pour Microsoft, fondement de l’écosystème impérial du PC, cela signifie un système d’exploitation polyvalent pouvant servir de pont entre les deux ères. Ne dit-on pas que Windows 8 aura deux interfaces facultatives, l’une classique à la Win 7, l’autre moderne à la Phone 7?
Ouin! Apple a beau proposer le iPad comme fer de lance de l’ère Post-PC, mais quand on y regarde de près, c’est un PC. Un PC hautement facilité, mais un PC quand même. Ne parle-t-on pas du harnachement d’un processeur, d’une mémoire, de circuits, d’un système d’exploitation et d’applications à des fins personnelles? Et essayez de l’utiliser pour faire autre chose que ce qui a été prévu, vous y arriverez peut-être, mais vous aurez à bricoler singulièrement.
Quant à Microsoft et consorts, si l’idée d’être sur le marché avec un dispositif pouvant concurrencer le iPad (un Post-PC autoproclamé) ressemble à la Stylistic Q550 de Fujitsu, on s’y met un doigt dans l’oeil. Cet appareil est une très belle machine Windows 7 avec tout le tremblement, autrement dit, un PC en bonne et due forme. Il ne reste plus qu’à lui brancher un clavier Bluetooth pour qu’on se retrouve avec un Tablet PC.
Il est tentant de croire les augures et autres mercaticiens « Post-PCistes »; on a l’impression de vivre un tournant dans l’évolution technologique. Pourtant, on tarde à remplacer l’essentiel clavier par un bidule ou une techno aussi efficace et productive. C’est dingue! Autrement dit, si l’ère Post-PC est avec nous, il manque encore des pièces fondamentales pour s’y adonner avec délectation.
En fait, l’approche de Jobs et, surtout, de Microsoft est classique. L’industrie du PC (entendre « ordinateur personnel ») commande l’informatisation des entreprises et des chaumières. De là découle une ribambelle de produits et de services qui viennent influencer la vie quotidienne : messagerie, gestion, loisirs, culture, etc.
Dans cette vision technoarrogante, le monde essentiellement asiatique du téléviseur, de la console, de certains électroménagers a constamment été regardé de haut. Il s’agissait de machins technos inférieurs dont les chroniqueurs informatiques ne parlaient jamais. Pourtant, on voit présentement des consoles naviguer sur la Toile et télécharger des films transmis par HDMI à des téléviseurs HD dont l’intelligence ne cesse d’évoluer. Et là-dedans, il n’y a ni Windows, ni Mac OS X.
Plus ça va, plus les électroménagers (fours à micro-ondes, laveuses, sécheuses, réfrigérateurs, etc.) disposent de systèmes embarqués (Linux, proprios ou autres) les rendant de plus en plus géniaux. Ce sont ces appareils ou ces gadgets que les consommateurs achètent et, en suivant un manuel généralement mal traduit, apprennent à faire fonctionner une fois pour toutes. Comble du bonheur, cette épreuve passée c’est fini. Ils n’ont pas de mise à jour/à niveau à faire, ni d’antivirus à installer, ni de système d’archivage par USB-2 ou eSata à imaginer, ni de disque lent à défragmenter, ni de SE à réinstaller. Télécommande en main, ils ne font plus de l’informatique, mais ils se divertissent ou communiquent.
Sans compter que de plus en plus, ils troquent leur cellulaire (voire leur ligne filaire) pour un téléphone intelligent, un appareil qui complète parfaitement bien ce qui précède. Vive le Wi-Fi, vive le 3G!
C’est, en quelque sorte, un ras-le-bol généralisé face à l’industrie informatique et ça, ce n’est pas pour remonter le moral de Michael Dell, P.D.G. de la méga-fabricante du même nom. Auquel cas doit-on parler chez les gens d’ère Post-PC ou de révolution électroménagère?
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Nelson Dumais est journaliste indépendant, spécialisé en technologies de l’information depuis plus de 20 ans.