Le 15 juin 1976, CGI était fondé avec un contrat du ministère des Affaires sociales du Québec dans son carnet de commandes. Trente ans plus tard, le groupe CGI emploie 25 000 professionnels et son chiffre d’affaires dépasse les 3,5 milliards de dollars. Entrevue exclusive avec le président exécutif du conseil et fondateur de CGI, Serge Godin.
Serge Godin avait obtenu du groupe IST en 1976, le mandat de mener une étude de marché pour mesurer l’opportunité de la création d’une division de services professionnels en informatique. L’analyse qu’il faisait à cette époque de la situation justifiait grandement la création d’une telle division de services. Mais soucieux de l’objectivité et de l’indépendance des éventuels conseillers, il recommandait de créer cette entité hors de la structure d’IST, qui a cette époque « vendait » des cycles-machines, une activité commerciale en informatique qu’on pourrait qualifier de précurseur à l’impartition.
À l’époque, IST a trouvé l’idée intéressante, mais préférait qu’une telle entité de services informatiques soit une division d’IST sous la responsabilité de Serge Godin, au sein du bureau de Québec d’IST et sous la supervision de l’individu qui vendait les cycles-machines. « Le lendemain, je démissionnais, nous confie M. Godin, je n’y croyais pas. » Il tenait beaucoup à l’idée d’objectivité, une question de principe.
Convaincu que l’idée était bonne, il crée quelques mois plus tard, la firme « Conseillers en Gestion et Informatique » (CGI), avec en poche un contrat de directeur de projet octroyé par le ministère des Affaires sociales du Québec, pour développer les systèmes d’information du ministère afin d’appuyer les négociations syndicales dans le secteur des affaires sociales. Cette année-là, l’entreprise fait un chiffre d’affaires de 138 000 $.
Le 18 octobre de la même année, André Imbeau, un ami personnel depuis toujours, se joint à Serge Godin pour le second contrat de l’entreprise, un contrat de gestion d’un projet d’informatisation du dossier étudiant, obtenu du siège social du réseau de l’Université du Québec. « C’est un fait intéressant, ce n’était pas évident au début de recruter des gens. On part une boîte de services-conseils en informatique, souligne en riant M. Godin, il n’y en avait pas beaucoup qui voulaient me suivre! Les seuls qui pouvaient se joindre, c’était des gens qui nous connaissaient bien. » D’autres contrats se sont ajoutés ensuite, dans les mois qui ont suivi, et « ces contrats-là sont entrés par des amis personnels avec lesquels nous nous avions étudié. »
En 1977, le premier « vrai » bureau de CGI est ouvert à Québec. L’année suivante, c’est Jean Brassard qui se joint à l’entreprise qui ouvre son premier bureau à Montréal. En 1979, l’entreprise génère son premier million de chiffres d’affaires.
La suite fait maintenant partie de l’histoire. Trente ans et 80 acquisitions plus tard, le Groupe CGI regroupe désormais 25 000 professionnels répartis au sein d’une centaine de bureaux, dans 16 pays. L’entreprise génère un chiffre d’affaires de 3,5 milliards de dollars.
« Environ 50 % de notre développement est venu de notre croissance interne et 50 % par acquisitions, particulièrement depuis que nous sommes une entreprise publique », poursuit M. Godin. CGI est devenue publique en 1986, profitant du programme des RÉA, Régime d’épargne-actions, créé quelques années auparavant par le ministre des Finances du Québec d’alors, Jacques Parizeau. Le capital levé par cette émission publique aura permis de financer l’acquisition de BST, une firme au sein de laquelle Serge Godin avait jadis travaillé.
Serge Godin explique que l’entreprise a dû croître ainsi, par acquisitions, pour l’assurer d’atteindre assez rapidement une masse critique nécessaire à l’obtention de certains contrats majeurs. « En 1992-93, on avait nos clients de base avec qui on travaillait depuis longtemps sur des projets très stratégiques et le jour où ces clients ont décidé d’aller en impartition complète des TI, on n’a même pas été invité, souligne M. Godin. Même si sur le plan de la qualité des services, on était vraiment apprécié avec des scores de 9,9 sur 10, à cause de l’absence de masse critique, on n’était même pas invité » à participer à l’appel d’offres.
L’expérience des acquisitions des 20 dernières années a permis à l’entreprise de raffiner la pratique de l’intégration de ces acquisitions. Elle a mis en place un processus qui valorise les professionnels des sociétés acquises tout en les amenant à partager les valeurs de base de la société et en intégrant les façons de faire qui ont fait la réputation de CGI et lui ont permis d’atteindre la certification ISO 9001.
CGI poursuivra cette stratégie de croissance au cours des prochaines années, estime Serge Godin. Et pour suivre ses clients qui développent leurs affaires à travers le monde, CGI considère des acquisitions à l’extérieur de l’Amérique du Nord. « De nos 100 plus grands clients, 65 font des affaires à la fois en Amérique du Nord et en Europe et 32 ont des activités en Asie-Pacifique. » Pour répondre aux besoins globaux de ses clients à l’international, CGI compte bien développer sa masse critique sur d’autres continents.
Trente ans plus tard, ces défis sont forts stimulants pour Serge Godin, qui trouve toujours plaisir et satisfaction à venir au bureau chaque matin, sachant que chaque nouveau contrat obtenu permettra à des professionnels de CGI de profiter d’une nouvelle opportunité de carrière. « C’est universel, conclut Serge Godin. C’est le sourire des gens, ici, à qui un nouveau contrat donnera un défi additionnel, c’est la satisfaction des clients à qui on a donné un bon coup de main; c’est ça qui m’anime. »
Lisez l’intégrale de cette entrevue avec Serge Godin dans l’édition de juillet-août du magazine Direction informatique.