On a à peine le temps de s’habituer aux félicités de la Creative Suite 4, qu’Adobe lance la CS5. Et que dire de la CS5.5 qui vient tout juste d’apparaître ? Pas évident à suivre ! Un regard sur l’évolution !
Parler de la Creative Suite 5.5 (CS5.5), un coffret de logiciels multimédias en cinq saveurs que vient de lancer Adobe Systems, c’est parler de l’instinct de survie et d’adaptation qui semble caractériser la fabricante californienne. Mais c’est aussi parler du superbe bras d’honneur qu’elle vient de servir à ceux qui, le pouce pointant vers le sol, avaient prédit le déclin, pour certains fatal, de sa plate-forme d’animation, Flash. Devant l’apparition de Silverlight, la concurrence venue de Microsoft, devant les vents du changement poussés par les premières implantations du HTML5 et devant l’entêtement d’Apple d’exclure Flash de sa gadgeterie mobile, plusieurs experts avaient en effet commis des verdicts pessimistes.
Or, à faire le tour de la CS5.5, on constate sans équivoque que Flash ne semble vraiment pas en route vers une voie de garage. Bien au contraire. La nouvelle collection de produits professionnels en fait le grand champion de la tolérance, de la collaboration et du bonheur. Ainsi, les développeurs pourront utiliser les nouveaux outils Flash pour travailler en HTML5, le nouveau langage du Web, ou en iQuery, la plateforme de développement Open Source en JavaScript qui permet notamment de créer des animations Web et des petites applications Ajax.
Mieux ! Flashbuilder 4.5 Premium, un des modules de CS5.5 Web Premium, rend possible l’émission du poncif « Qui l’eut cru ? ». Désormais, il pourra servir à développer des applications non seulement pour Android, le système d’exploitation mobile de Google, ou pour le PlayBook de Research In Motion, mais aussi pour l’iOS d’Apple, l’intelligence derrière les iPhones, les iPad et les iPod touch. Doctement déclarée dépassée en giron mobile, il n’y a pas si longtemps, Abobe vient ainsi de rebondir.
Autre nouveauté digne de mention, le module InDesign CS5.5 fait lui aussi un bond en avant, un bond à la Cortez avec, presque, ses navires incendiés. Ce logiciel de mise en page (éditique) dont l’illustre ancêtre se nommait PageMaker, abandonne, pratiquement, la publication imprimée pour favoriser celle sur livrel et sur tablettes. Il faut savoir s’adapter à un marché médiatique où le papier est en voie d’être remplacé par l’électronique.
Ici, petit détail ! Avant de se lancer tête première dans la production d’un magazine destiné aux tablettes, il est important de bien considérer ce qu’Adobe appelle la Digital Publishing Suite. Grosso modo, c’est le service qui rend possible la distribution des contenus sur Android (Google), iOS (Apple) et autres supports majeurs dans le monde trépidant des tablettes. Ce système permet d’acheter des abonnements en allant aux « Market Places » et aux « App Stores » des différentes plateformes. Il offre en outre des analyses, des rapports, des états et tout le Saint-Frusquin.
Or, ce n’est pas donné. On parle de 699 $US par mois plus des frais additionnels pour chaque édition. Semble-t-il que sur cette base, il faut s’attendre à devoir payer au minimumquelque 12 000 $ par année pour un magazine mensuel, quelle qu’en soit la taille ou la fréquence. Si cela peut faire hausser les épaules aux grands canards, il en sera tout autrement chez les petits, les marginaux, les jeunes entrepreneurs. Mais, bien sûr, ces frais sont déjà moindres que ceux requis par un processus d’édition imprimée.
Un mot sur Photoshop qui, mine de rien, se tourne lui aussi vers la mobilité. Son moteur de scripts permet maintenant à des applications tactiles conçues pour les tablettes, incluant le iPad d’Apple, de communiquer avec Photoshop CS5 installé dans un PC ou un Mac. À cet effet, Adobe publiera sous peu un Photoshop Touch SDK (trousse de développement logiciel) qui viendra faciliter cette nouveauté. D’où le numéro de version CS5.1 du nouveau Photoshop qui, quant au reste, est identique à sa version CS5.
Pour tout dire, pas tous les quinze logiciels (et les quatre services partagés) constituant l’écurie CS5.5 sont nouveaux. Par exemple, le très populaire Illustrator se présente en version CS5. Idem pour Bridge, Contribute, OnLocation, Encore et Fireworks. En ce sens, le numéro de version 5.5 ne signifie qu’un changement intermédiaire entre deux grandes moutures, la CS5 et la CS6, cette dernière devant apparaître en avril 2012.
Adobe agira désormais ainsi. Tous les deux ans, il y aura lancement d’une version majeure et, à mi-chemin, d’une version intermédiaire. Apparemment, les planifications d’achat seront plus simples. On se souvient de la première Creative Suite (CS) qui était apparue en septembre 2003, suivie, en avril 2005, de la CS2, puis de la CS3 en mars 2007 et de la CS4 en septembre 2008, avec, finalement, la CS5 en avril 2010.
Quinze logiciels et quatre services partagés (p. ex. Bridge) emballés en cinq grandes moutures, avec une nouvelle version complète ou mitoyenne à chaque année, c’est un peu compliqué tout cela. D’autant plus que ces produits coûtent généralement la peau des fesses. Par exemple, la Master Collection où on retrouve absolument tout se vend 2 599 $US et, à l’autre extrême, la Design Standard coûte 1 299 $US. Quant aux logiciels individuels, leur prix oscille entre 199 $US et 999 $US (on ne parle pas ici de mises à niveau, des versions moins onéreuses qui constituent une autre source de tracas). Tout cela est un pensez-y-bien tant au niveau déboursé qu’à celui de la planification d’achat. D’où la nouvelle formule de souscription lancée en même temps que la CS5.5.
Les utilisateurs peuvent s’abonner au mois ou à l’année à un des logiciels proposés (les plus populaires) ou à une des cinq moutures de coffret. Par exemple, un abonnement à Photoshop coûtera 35 $US par mois ou, dans le cas de la Master Collection, 129 $US par mois, advenant un abonnement annuel. Mais les versements mensuels seront plus élevés si l’abonnement se fait sur une base mensuelle. Ainsi, le 35 $US devient 49 $US et le 129 $US, 195 $US. Un tel service rende possible, par exemple, de commencer avec Photoshop, d’ajouter, en cours de route, juste pour voir, Illustrator et de finir l’année avec le coffret Design Standard.
Nelson Dumais est journaliste indépendant, spécialisé en technologies de l’information depuis plus de 20 ans.