Craignant qu’après la décision du Cabinet sur les tarifs de gros, l’approbation de la fusion de Rogers et Shaw par le gouvernement fédéral se traduise par de nouvelles mesures de fixation des tarifs et des hausses de prix par « l’oligopole canadien des télécommunications », le fournisseur de service Internet (FSI) indépendant TekSavvy de Chatham, en Ontario, a demandé aujourd’hui au ministre de l’Industrie, des Sciences et de la Technologie du Canada, François-Philippe Champagne, de bloquer la fusion de 26 milliards de dollars proposée en refusant le transfert des licences de spectre sans fil de Shaw ainsi que l’acquisition de Freedom Mobile par Vidéotron.
« Après avoir réussi à convaincre le ministre d’imposer des tarifs réglementés ruineux à de plus petits concurrents, ces grandes sociétés veulent maintenant se répartir le marché et fixer les tarifs entre elles », précise le porte-parole de TekSavvy, Peter Nowak dans un communiqué. « Le ministre Champagne doit bloquer cet accord anticoncurrentiel, sinon elles vont bientôt évincer les FSI restants et hausser encore plus les prix à la consommation. »
TekSavvy, qui se présente comme la plus grande entreprise de télécommunication indépendante au Canada, affirme que l’approbation de la fusion par le gouvernement fédéral doit être conditionnelle à la mise en œuvre de la décision prise par le CRTC en 2019 de réduire ses tarifs réglementés.
En mai 2022, le ministre Champagne a cependant refusé de mettre en œuvre cette décision du CRTC et a plutôt approuvé des tarifs réglementés beaucoup plus élevés, comme le demandaient Rogers et Bell. TekSavvy affirme que les propres données du gouvernement fédéral confirment que les prix d’Internet au Canada montent en flèche pendant une crise sans précédent du coût de la vie.
Le projet de fusion entre Rogers et Shaw a été approuvé par le Tribunal de la concurrence le 29 décembre mais le Bureau de la concurrence a interjeté appel de la décision du Tribunal auprès de la Cour d’appel fédérale. L’appel sera entendu le 24 janvier. En outre, la transaction proposée est assujettie à l’approbation finale du ministre Champagne.
Lors des audiences du Tribunal de la concurrence, les sociétés ont révélé que toute la transaction repose sur une entente parallèle selon laquelle Rogers louera son réseau à large bande à Vidéotron à des tarifs de gros spéciaux qui ne sont pas offerts aux fournisseurs de services Internet indépendants.
Le CRTC fixe les tarifs de gros payés par les FSI indépendants qui louent l’accès des grands fournisseurs. Ces tarifs réglementés déterminent indirectement ce que les consommateurs canadiens paient pour les services Internet. Lorsque le Bureau de la concurrence a soutenu que les tarifs du CRTC étaient si élevés que Vidéotron ne pouvait pas les utiliser pour faire concurrence, Rogers a confirmé qu’elle accorderait à Vidéotron des tarifs préférentiels inférieurs aux tarifs réglementés établis par le CRTC.