Si on en croit le torontois Stephen Kleyhans, VP chez Gartner, il est fort possible que des entreprises procèdent cette année au déploiement de Windows Vista malgré le fait que son successeur, Windows 7, pourra être lancé d’ici l’automne.
Cette étonnante affirmation, compte tenu de la réputation de Vista, se base sur une étude publiée il y a quinze jours par la firme de recherche intitulée « Getting Off Windows XP Is More Important Than Windows Vista vs. Windows 7 ». Cette prédiction se base sur le fait que la grande entreprise a besoin, normalement, d’une fourchette de 12 à 18 mois après le lancement d’un système d’exploitation (SE) avant de commencer à le déployer, ce qui coïncide, normalement, avec la publication d’un premier Service Pack (SP-1). De toute façon, les éditeurs indépendants de logiciels (ISV) mettent au moins un an avant de commence à soutenir un nouveau SE de Microsoft. « Pendant ce laps de temps, l’entreprise teste ses applications stratégiques et ses procédures et pousse sur ses fournisseurs “critiques” pour qu’ils soient en situation de soutien ». C’est un constat qui se retrouve articulé dans une autre recherche récente de Gartner intitulée « Windows 7 Won’t Need SP1, but Will Still Need 12 to 18 Months Before Deployment Begins ». Mais si on calcule tout, des études de faisabilité au bilan du déploiement, soutient le VP de Gartner, « les grandes organisations ont besoin de 4 1/2 ans pour compléter un changement de plate-forme ». Pour le commun des mortels, un tel délai représente peut-être un siècle, mais pour ces firmes de plus de 1 000 employés, ce n’est rien. Bien que cette évaluation reçoive l’aval d’Elliot Katz, porte-parole de Microsoft Canada, elle se retrouve un peu nuancée. Microsoft dispose en effet d’un outil de déploiement appelé « Microsoft Desktop Optimization Pack » (MDOP) qui grâce à différentes mesures, dont le recours à la virtualisation, permettrait de réduire le temps et les coûts dans une opération de déploiement. « Cette période de 12 à 18 moins pourrait être comprimée », affirme-t-il. Mais toutes les entreprises n’auront pas recours au MDOP. Ainsi, en se basant sur le postulat de Gartner, supposons qu’une grosse boîte attende le lancement de Windows 7 avant d’abandonner Windows XP et supposons que la nouvelle mouture du SE de Microsoft apparaisse officiellement à l’automne 2009. Cela signifie, explique l’analyste de Gartner, qu’elle ne commencera vraiment à le déployer que dans la première moitié de 2011. Or, étant donné que Microsoft mettra fin au soutien étendu de XP en avril 2014, plusieurs fournisseurs d’applications cesseront leur soutien XP dès 2012, ce qui plongera l’entreprise dans l’inconfort de l’incertitude. Ajoutons maintenant à ce phénomène, l’effet de la crise économique actuelle. On parle ici d’un sur-place variant entre 6 à 9 mois avant toute prise de décision concernant un déploiement. Auquel cas, soutien Stephen Kleyhans, on ne parle plus de la première moitié de 2011 comme l’épicentre de la migration vers Win 7, mais au mieux, de l’automne suivant.
Dès lors, le calcul est simple : le déploiement se terminera alors que le soutien de Win XP aura été complètement abandonné. « Ces entreprises manqueront donc de temps pour compléter une migration harmonieuse et, probablement, voudront un délai supplémentaire », ce qui constitue une « probabilité improbablement probable ». Win XP en sera alors à sa treizième année d’existence. Rappelez-vous ce qu’il y avait dans vos PC, il y a 13 ans en 1997 : NT 3.5 ou 4, Win 3.11 ou 95, NetWare 4.0 ou 4.1? Que sont ces produits devenus? Mais redevenons pratico-pratiques sur un plancher de béton où on ne court aucun risque. Sachant qu’elles commenceront à avoir des difficultés de soutien dès 2012 avec leurs applications XP, des entreprises ont déjà pris la décision de se départir de cette plate-forme. Et, ce qu’elles testent depuis un an ou quelque, ce n’est pas Win 7, mais Vista, ce SE mal aimé qu’elles commenceront à déployer une fois leurs vérifications terminées. En ce sens, on s’attend à ce que plusieurs commencent à le faire d’ici décembre 2009. Bien entendu, elles ne tiendront pas pour acquis que « si ça marche sous Vista, ça marchera sous Win 7 ». L’idée importante à se rappeler est qu’il est impératif de prendre une décision de remplacement de Win XP, voire de Win 2000, dès maintenant. Il y a urgence, soutient Stephen Kleyhans. « S’il vous apparaît impossible de décider, dit-il, tâchez de mettre le doigt sur le problème qui vous en empêche et réglez-le! » Les entreprises qui ne l’ont pas encore fait doivent commencer à tester leurs applications, voir où sont les irritants. « Cela ne coûte pas une fortune ». Ensuite, il leur faut parler avec leurs fournisseurs de matériel et de logiciel, question de bien préparer le soutien. De toute façon, font remarquer aussi bien M. Kleyhans que M. Katz, installer Vista et bien prendre son temps avant de passer à Win 7 n’est pas une mauvaise idée. Depuis le SP1 et la popularité de la version 64 bits, la réputation de ce SE s’est grandement améliorée. « On l’a décrié parce qu’il apportait des changements substantiels à l’écosystème Windows, souligne le VP de Gartner, alors qu’il ne faisait que paver le chemin pour des SE modernes de la trempe de Win 7. »
Le jugement est du miel pour la gorge malmenée d’Eliot Katz. « Les entreprises qui agiront ainsi, ajoute-t-il, tireront profit d’un SE moderne, découvriront des caractéristiques de sécurité qui leur plairont, apprécieront la convivialité de Vista et se rapprocheront de Win 7. » Quoi qu’il en soit, conclut-il, « Gartner a raison dans le sens que les entreprises qui ne l’ont pas encore fait doivent prendre une décision maintenant. Pour les aider, nous avons préparé un guide appelé Springboard que l’on peut retrouver dans TechNet. » Si on en croit les chiffres publiés il y a quinze jours par la firme de recherche Janco, Windows Vista se retrouvait dans 19,53 % des PC mondiaux, cela 27 mois après son lancement initial. Net Application se montrait cependant un peu plus généreuse avec 23,42 % des PC, contre 62,85 % pour XP. Le chiffre le plus encourageant rencontré provient de StatCounter qui accorde près du tiers de marché américain à Vista. SE mal-aimé, vous ai-je écrit plus haut? Le serait-il de moins en moins?
Nelson Dumais est journaliste indépendant, spécialisé en technologies de l’information depuis plus de 20 ans.