Un des marchés les plus dynamiques de l’industrie des TIC, le marché de la téléphonie mobile est, avec celui de l’informatique ultraportative, un marché en ébullition qui se cherche et repousse sans cesse ses limites.
Si le marché des ordinateurs de bureau stagne actuellement, il en va autrement de celui des téléphones mobiles qui est en pleine effervescence. Les dernières années ont vu le marché se redéfinir continuellement, et l’introduction sur le marché de la dernière génération du iPhone d’Apple, désigné G3, le 11 juillet dernier a considérablement changé la donne sur ce marché qui est, avec celui de l’informatique portative, un des plus dynamiques de l’industrie des technologies de l’information et des communications (TIC). C’est du moins ce que prétendent certaines firmes d’étude de marché, telles que ABI Research qui soutient que « le téléphone mobile constitue le produit électronique de consommation qui se vend le plus au monde ».
La demande sur le marché est alimentée évidemment par de nouveaux acheteurs, mais aussi et surtout par des acheteurs qui n’en sont pas à leur premier appareil et qui veulent avoir le dernier cri pour améliorer leur expérience d’utilisation et avoir accès à davantage de fonctionnalités. Il s’agit donc essentiellement d’un marché de remplacement qui offre de grandes possibilités de croissance.
C’est dans cette perspective que ABI Research s’attend à ce que 1,3 milliard d’appareils soient vendus à la grandeur de la planète au terme de l’année en cours, ce qui représente une croissance de 13 % par rapport à 2007 (301 millions d’appareils ont été vendus au cours du deuxième trimestre de 2008). Avec une part de 40,3 %, Nokia occupe la première position sur le marché, suivi de Samsung (15,2 %) et de Motorola (9,3 %).
Plus prudente, Gartner prédit une croissance de 11 % en 2008, alors que 1,28 milliard d’appareils seront vendus mondialement, comparativement à 1,15 milliard d’unités en 2007, et une croissance moindre (10,3 %) en 2009 par rapport à 2008. La firme est d’avis que le marché nord-américain a atteint un niveau de saturation, alors que le nombre d’appareils vendus en 2008, qui devrait atteindre 185,7 millions, ne croîtra que de 5,3 % par rapport à 2007. En Europe de l’Ouest, la saturation est encore plus grande, puisque la croissance n’y sera que de 1,5 %.
En générant des pressions sur les prix, cette saturation pousse les opérateurs à trouver de nouvelles sources de revenus, telles que l’offre de nouveaux services ou la vente de contenus aux usagers, ce qui implique des investissements au niveau de l’infrastructure de réseau. C’est d’ailleurs l’introduction de nouvelles fonctionnalités au niveau des appareils de haut de gamme qui a permis au marché de croître d’année en année de 15,3 % au deuxième trimestre de 2008, alors que 306 millions d’unités ont été vendus mondialement, selon IDC. On trouve parmi les nouvelles fonctionnalités la géolocalisation (GPS), les écrans tactiles et des fonctions multimédias, tous des atouts que propose le iPhone G3 d’Apple qui, aux dires de ABI Research, « a réécrit les règles sur le marché de la téléphonie mobile ». La firme s’attend, en outre, à ce que l’interface d’utilisation du G3, qui a recours à un accéléromètre et à la rétroaction haptique au niveau de l’écran tactile, devienne éventuellement la norme.
Téléphones griffés
L’introduction de modèles griffés sur le marché, fabriqués par les marques de luxe, tel que Dior, en partenariat avec les manufacturiers de téléphones, va dans le même sens. ABI Research s’attend à ce que les ventes de téléphones griffés atteignent mondialement 11 milliards $ US en 2009, puis 43 milliards $ US en 2013. Cette croissance va de pair avec la volonté des consommateurs de souligner leur richesse et leur adhésion à un certain style de vie par l’entremise de leur téléphone portable. « Pour les fabricants de produits de luxe, les téléphones mobiles constituent un ajout logique à leur portfolio qui comprend déjà des bijoux, des montres et autres accessoires de mode, de dire Kevin Burden, directeur de recherche chez ABI Research. Pour le fabricant de téléphones, l’introduction d’un modèle de luxe n’équivaut pas seulement à ajouter un énième nouveau téléphone à son offre, mais cela représente une approche stratégique valable permettant d’accroître son capital de marque sur le marché. »
En fait, la demande pour les appareils haut de gamme et les téléphones intelligents (smartphones) croît à un rythme annuel bien supérieur à l’ensemble du marché, soit 40 %, selon IDC qui s’attend à ce que les fonctionnalités avancées que proposent les modèles de haut de gamme se généralisent progressivement aux modèles plus bas de gamme.
Par conséquent, Gartner s’attend à ce que les fabricants de téléphones soient de plus en plus nombreux à s’allier à des compagnies de mode, mais aussi à des fabricants d’articles de sport qui proposent aussi un style de vie particulier, ce qui permettra de rejoindre un marché encore plus vaste. En retour, l’introduction de modèles de plus en plus dispendieux militera en faveur d’une conception plus évolutive des appareils qui pourront ainsi être mis à niveau plus facilement.
Le marché évoluant rapidement, les fabricants de téléphones mobiles doivent demeurer très vigilants et ne pas s’asseoir sur leurs lauriers pour conserver leur positionnement, voire leur avance sur le marché. « Dans trois ou quatre ans, aucun manufacturier, peu importe la position qu’il occupe sur le marché aujourd’hui, ne sera dans une ‘zone de confort’ », prédit Stuart Carlaw, vice-président et directeur de recherche chez ABI Research, qui ajoute queles marchés développés et ceux en développement sont soumis à des forces divergentes, déterminées par leur niveau de développement, dont il faut ternir compte si on veut y faire affaires et prospérer.
« L’avènement de l’accès à plus large bande, la volonté de maximiser les revenus provenant des services de données et d’amener les systèmes d’exploitation des téléphones intelligents au niveau des modèles plus bas de gamme, de même que l’évolution rapide que connaissent les interfaces d’utilisation, font que les téléphones de 2010 seront radicalement différents de ceux qu’on a aujourd’hui, enchaîne-t-il. […] Loin d’être en proie à la consolidation, le marché de la mobilité prend de l’expansion et montre des signes de microsegmentation. Les influences disruptives sont multiples. »
Services connexes
L’offre de services sans liens avec les services de communications traditionnels, tel que des services-conseils et des services de publicité, est une autre avenue que préconiseront de plus en plus les opérateurs nord-américains pour multiplier leurs sources de revenus sur un marché en voie de saturation. En fait, Gartner s’attend à ce qu’en 2012 la moitié des 20 plus importants transporteurs desservant les marchés développés offrent ces nouveaux types de services qui généreront au moins 15 % de leurs revenus. Par conséquent, ils devront affronter un nouveau type de concurrence, notamment celle des entreprises Internet et des équipementiers.
Au niveau plus particulier des services de publicité sur appareils mobiles, Gartner est d’avis que pour pouvoir profiter pleinement de ce marché, qui générera des revenus de 12 milliards $ US en 2011, les transporteurs devront réaliser un exercice de réflexion stratégique préalable. Ils devront premièrement s’assurer que leur approche se démarque des compétiteurs, qui incluent des manufacturiers de téléphones et des compagnies Internet, de sorte à séduire les annonceurs. Aussi, les transporteurs doivent identifier les atouts dont ils disposent par rapport aux fournisseurs concurrents, tels que l’accès à des canaux de communication multiples (messagerie instantanée, messagerie multimédia, portails Internet, services géolocalisés, etc.), un lien privilégié avec la clientèle, l’accès à un grand bassin de clients, la connaissance des marchés locaux et le contrôle du réseau, et faire en sorte d’en tirer profit.
L’introduction des appareils sans fil de dernière génération, tels que les téléphones intelligents de type iPhone et les ordinateurs ultraportatifs, dans l’environnement informatique des entreprises amènera de plus en plus d’entreprises à vouloir se doter de réseaux locaux sans fil, voire étendre leurs réseaux existants, stimulant de ce fait la demande pour les technologies qui les supportent. Par conséquent, la firme Dell’Oro Group s’attend à ce que les ventes de solutions de communications sans fil croissent à un rythme soutenu d’ici 2012, alors qu’elles devraient avoisiner les 4 milliards $ US, soit le double de ce qu’elles totalisent actuellement.
Alain Beaulieu est adjoint au rédacteur en chef au magazine Direction informatique.