Apple annonce qu’on pourra bientôt exploiter Windows sous les nouveaux Mac, alors que Microsoft dévoile l’exploitation de versions de Linux sous Virtual Server. Pourquoi ce soudain attrait pour l’informatique transbinaire?
Cette semaine, coup sur coup, deux grands noms de l’informatique ont procédé à des annonces qui en ont surpris plus d’un. D’une part, Apple a donné un aperçu de Boot Camp, un logiciel en version bêta publique qui permettra aux propriétaires d’un ordinateur Macintosh doté d’un processeur Intel d’installer et d’utiliser Windows XP. De l’autre, Microsoft a annoncé que le logiciel gratuit de virtualisation Virtual Server 2005 R2 était apte à exploiter certaines distributions de l’environnement Linux.
Des fenêtres sur la pomme ? Des pingouins dans les fenêtres ? C’est le monde à l’envers ! Ces soudaines cohabitations de systèmes d’exploitation, dont les exploitants se sont parfois respectivement juré une haine éternelle, feraient des jaloux auprès de plusieurs conciliateurs dans les tribunaux ou bien aux Nations Unies…
Sérieusement, il est à se questionner de la pertinence d’un développeur d’un système d’exploitation d’offrir un soutien aux systèmes d’exploitation des concurrents. Leurs produits ne sont-ils pas supposés, fondamentalement, être meilleurs que ceux de leurs concurrents ? N’offrent-ils pas des produits équivalents ou une compatibilité de lecture et d’écriture de documents pour une utilisation avec les applications utilisées dans les environnements des concurrents ? Alors, à quoi bon offrir un tel support ?
Dans le cas d’Apple, qui au cours des dernières années a produit un grand nombre de logiciels qui se démarquent admirablement des équivalents offerts sous l’environnement Windows, seule l’exploitation de logiciels très spécialisés qui n’ont justement pas d’équivalent dans l’univers de la Pomme pourrait justifier le recours à Boot Camp. Mais encore, est-ce que les organisations qui utilisent des logiciels conçus pour Windows, bien qu’elles se standardisent sur l’environnement Mac, s’empêcheraient d’utiliser quelques ordinateurs de type PC pour ces logiciels spécialisés ?
Quant à Microsoft qui supporterait Linux sous ses serveurs, on se demande pourquoi le géant de Redmond accepte ainsi de laisser entrer le pingouin dans la poissonnerie, comme le loup dans l’expression connue. Est-ce ici encore pour capter un marché gris d’entreprises qui souhaiteraient exploiter des applications Linux spécialisées ?
Alors qu’Apple gruge lentement mais sûrement des parts de marché à Microsoft, il peut être plausible que cette stratégie d’ouverture vise à convaincre des utilisateurs d’opter pour les fruits issus de son verger. Quant à Microsoft, qui se fait aussi gruger des parts de marché par Linux, il reste à voir si cette stratégie sera adoptée par des organisations tentées de délaisser l’environnement Windows pour certains besoins applicatifs.
Mais la véritable question à se poser est de savoir comment cette cohabitation se réalisera dans le monde réel. Est-ce que la performance des systèmes sera identique aux situations d’exploitation sur un système original ? Est-ce que les logiciels fonctionneront à merveille ou seront-ils confondus ? Il est à parier que bien des gestionnaires demanderont la réalisation d’essais en laboratoire pour voir si les promesses de cohabitation sont une réalité ou une utopie.
Plusieurs ont essayé par le passé, sans grand succès, de mélanger les genres dans le domaine informatique. Bien souvent, le mélange des pommes et des poires (ou des pingouins) était si peu convaincant que la mixture a été jetée par la fenêtre…