Ce deuxième volet d’un dossier consacré aux technologies mobiles et sans fil traite du “Sixth Sense Project”, du Media Lab du Massachusetts Institue of Technology, qui fonde le futur tes technologies sans fil sur la convergence et le regroupement.
Issu du Media Lab du MIT, le « Sixth Sense Project » est d’abord un concept qui consiste a exploiter des applications Web 2.0, pour l’instant, en mode SaaS (Software as a Service) au travers du nuage informatique (Cloud computing) en utilisant un téléphone cellulaire capable de surfer sur Internet et relié, sans fil, à une interface disposant de l’ouïe, de la vue, de moyens d’expressions et d’interprétation et de codes gestuels produits par les mains de l’utilisateur. Tous les éléments sont reliés sans fil, par essence même. Il s’agit d’une configuration sans clavier, sans souris, sans écran, sans CPU ni unité de stockage, sur place. En outre, l’utilisateur n’est pas devant l’appareil, mais derrière, et se trouve inclus dans la configuration!
Composition du système
De façon pratico-pratique, afin de tester le concept et d’en démontrer la faisabilité et l’efficacité, le Media Lab a construit un premier prototype en utilisant des éléments séparés, disponibles sur le marché. Ainsi, ce prototype, complètement fonctionnel, se compose d’un téléphone cellulaire capable de naviguer sur Internet, d’une oreillette, d’un micro minuscule, d’une caméra miniaturisée, d’un mini projeteur, d’une liaison Internet, d’un serveur distant et d’une interface basée sur une série de codes gestuels. L’ensemble de ses minuscules éléments est regroupé entre eux et compte tenu de leur légèreté, est suspendu au cou de l’utilisateur par une petite courroie du type de celle utilisée pour pendre les clés. Il faut ajouter à cet ensemble des applications disponibles en mode SaaS.
Mode de fonctionnement
Ce système sans fil est bâti autour d’un téléphone cellulaire capable de naviguer sur Internet et que l’utilisateur porte attaché à sa ceinture. C’est l’élément de communication qui émet et qui reçoit les données des applications et les commandes de l’OS. Ce téléphone est relié sans fil à une oreillette que porte l’utilisateur pour entendre les données vocales qui entrent.
Le téléphone est aussi relié à un minuscule micro ultra-sensible. Il est généralement intégré à l’oreillette et suffisamment sensible pour capter la voix de l’utilisateur. Le téléphone est aussi relié à une caméra afin de lui transmettre les commandes pour photographier ou filmer ce qui lui est indiqué, puis de transmettre à l’ordinateur distant les photos réalisées ou le film saisi.
De plus, la caméra suit en permanence les mains de l’utilisateur et transmet les gestes à l’ordinateur distant pour interprétation et action. En effet, le fonctionnement du système est basé sur une série de codes gestuels que l’utilisateur doit faire avec les mains. Cette gestuelle est en fait l’interface homme/machine du système et remplace ainsi le clavier, la souris et le pavé numérique des ordinateurs et des téléphones standards.
Le téléphone est aussi relié à un miniprojecteur pour lui transmettre les commandes et les paramètres d’affichage, ainsi que les données à afficher. C’est le projecteur avec son action de projeter sur tous types de surface, qui remplace l’écran.
Quelques exemples de fonctionnement
Le clavier numérique du téléphone est directement projeté dans le creux de la main de l’utilisateur. Sur chacun des 4 doigts s’alignent les 4 rangées de chiffres du clavier téléphonique. L’utilisateur compose alors sur ce clavier virtuel, le numéro de son correspondant, qui s’affiche dans la paume de sa main. Puis, de l’autre main, il pointe le bouton « COMPOSER » qui vient de s’afficher.
Pour se déplacer sans s’égarer, des flèches lumineuses virtuelles sont directement projetées sur le pare-brise de l’auto ou bien sur le sol lorsque l’utilisateur est un piéton – y compris à l’intérieur d’un bâtiment – par l’application de GPS, indiquant ainsi la direction à suivre.
Pour l’utilisateur, plus besoin de montre. En exposant son poignet au projecteur et en faisant un signe circulaire du doigt, un cadran lumineux virtuel s’affiche, indiquant l’heure locale, quel que soit le lieu où l’utilisateur se trouve.
Confortablement assis à une table d’une échoppe, en sirotant un café, l’utilisateur peut faire projeter sur cette même table la page de son logiciel de courriel préféré et y relever ses messages en pointant les commandes du doigt. S’il désire rédiger un message et s’il n’est pas à l’aise avec la composition vocale, il pourra demander qu’un clavier virtuel soit projeté sur la table, en dessous de la page Web. Il composera son message en pointant les lettres avec ses doigts, comme sur un clavier standard. Le message s’affichera en temps réel sur la page Web projetée sur la table.
Il pourrait aussi s’agir d’un fureteur, pour surfer sur Internet, d’une application de traitement de texte, d’un chiffrier électronique, d’un logiciel de graphique ou de présentation, etc.
En plaçant en équerre le pouce et l’index de chaque main, puis en formant un carré au travers duquel il regarde, comme le font les réalisateurs de cinéma pour imaginer un plan, l’utilisateur déclenchera la prise en photo ou bien le tournage d’une séquence vidéo de ce qu’il a ainsi délimité.
Si on ajoute à cela l’usage des « tags », ces codes à barres en 2D pour les téléphones portables, les applications se trouvent démultipliées. En lisant son journal, l’utilisateur se voit proposer une vidéo du sujet concerné, qu’il pourra regarder simplement en pointant un « tag » du doigt.
Avant de quitter son domicile, l’utilisateur aura pris soin de faire sa liste d’épicerie sur son ordinateur. En entrant dans le supermarché, son équipement identifie le magasin par l’intermédiaire des « tags » placés à l’entrée. Immédiatement, son équipement se connecte à la base de données des produits du magasin qui indique, dans un ordre rationnel, la localisation des produits figurant sur la liste. L’utilisateur suit ainsi un véritable parcours du combattant, optimisé par la projection de flèches directrices virtuelles, comme le fait l’application de GPS.
Aux limites de l’imagination
À partir de là, seule l’imagination devient une limite. Certes, il va falloir une masse critique pour qu’une telle utilisation voie le jour, pour qu’apparaisse une variété suffisante d’applications et que les ténors du logiciel s’y impliquent et adaptent leurs produits au mode SaaS. On pourrait même voir apparaître des imprimantes laser couleur en libre-service tarifé, comme le sont les combinés dans les cabines téléphoniques actuelles.
Nul doute qu’une fois commercialisable, le projet verra apparaître diverses versions de sa configuration matérielle, avec différents degrés d’intégration et de miniaturisation.
Il semble bien que l’évolution ne consiste plus à utiliser le sans-fil, ni même à en être acteur, mais bel et bien de devenir partie intégrante du système et de se retrouver au cœur même du sans fil. Avec le concept ouvert par le « Projet sixième sens », la pratique du sans-fil n’exige plus le transport d’une unité de traitement, ni de périphériques de saisie que sont le clavier et la souris, ni même de périphérique de visualisation qu’est l’écran. Seuls doivent subsister les éléments spécifiques dédiés aux moyens de communication de l’interface elle-même. Comme il s’agit de simple matériel, anonyme, il pourrait être possible d’en trouver dans les chambres d’hôtel, dans les cafés, les restaurants et peut-être même les chaînes de magasins, en prêt ou en location.
Des rêves technologiques les plus fous à l’utilisation journalière du système, le chemin passe souvent par une dure réalité des plus terre-à-terre. Il faudra encore alimenter tous ces gadgets en courant électrique, aussi faible soit-il. Et du coup, le spectre de la batterie ressurgit instantanément. Quand on pense qu’aujourd’hui, le plus évolué des téléphones cellulaires du commerce ne parvient pas à finir sa journée sans une batterie à plat, le mettant hors service vers 17 h, lorsqu’il est entre les mains d’un adolescent adepte du texto!
Comme une image vaut mille mots, voilà une petite présentation du projet sur la chaîne YouTube de l’événement TED.
Pour en savoir plus, consultez le site officiel du « Sixth Sens projet ».
Gérard Blanc est associé principal d’une firme conseil en gestion et en systèmes d’information.