Lors du 22e Sommet canadien des télécommunications, la présidente du Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes (CRTC), Vicky Eatrides, a annoncé que les grandes entreprises de câblodistribution et de téléphone devront partager leurs réseaux de fibre optique jusqu’au domicile (FTTH) avec leurs concurrents afin d’augmenter leur concurrence et des prix plus bas pour les clients. Cette décision fait suite à une procédure publique lancée en mars de cette année.
Dans le cadre de cette décision, le CRTC a déclaré qu’il offrait aux concurrents un « moyen pratique » de vendre des services Internet en utilisant les réseaux FTTH des grandes compagnies de téléphone de l’Ontario et du Québec, où, selon Mme Eatrides, la concurrence a le plus diminué.
Les grands opérateurs de télécoms sont tenus de fournir à leurs concurrents un accès à leurs réseaux FTTH dans un délai de six mois, durant lesquels ils peuvent préparer leurs réseaux, développer des systèmes de facturation, etc.
Le CRTC fixera également les tarifs provisoires que les concurrents devront payer lorsqu’ils vendront des services sur les réseaux FTTH.
Selon le Conseil, les tarifs ont été choisis pour permettre aux sociétés de télécommunications canadiennes de continuer à investir dans leurs réseaux.
Mais juste après l’annonce du CRTC, Bell a annoncé qu’elle réduirait ses investissements essentiels dans les réseaux et ses dépenses en capital de plus d’un milliard de dollars canadiens en 2024-2025.
La société a déclaré dans un communiqué : « La réduction de l’expansion du réseau de fibre optique est une conséquence directe de la décision du CRTC. La décision d’aujourd’hui oblige Bell à ouvrir son réseau de fibre optique en Ontario et au Québec, mais n’impose pas l’accès aux réseaux de fibre optique jusqu’à l’abonné dans l’ouest du Canada, où plus de trois millions d’emplacements de fibre optique ont été recensés. Si l’intention de la décision est de profiter aux consommateurs, il est arbitraire et capricieux de laisser de côté les consommateurs de l’Ouest canadien. Lorsque Bell s’implante dans une collectivité en offrant l’accès à un service Internet haute vitesse sur fibre optique, elle accroît la concurrence et les clients bénéficient d’un meilleur service, d’une plus grande valeur et de prix plus bas. »
Le CRTC a toutefois soutenu que les concurrents indépendants en Ontario et au Québec servent désormais 47 pour cent de clients en moins qu’il y a deux ans, tandis que simultanément, plusieurs concurrents ont été rachetés par de grandes sociétés de télécommunications, réduisant ainsi le choix pour les Canadiens.
Le discours de Mme Eatrides a été précédé par celui de Robert Ghiz, président de l’Association canadienne des télécommunications (ACT), qui affirmait tout le contraire.
Il a soutenu que les prix des services téléphoniques et sans fil ont en fait baissé au Canada.
« Il y a tellement de choses écrites sur les prix des télécommunications au Canada, et malheureusement, une grande partie est fausse », a noté M. Ghiz. « Alors laissez-moi remettre les pendules à l’heure. Je n’ai pas besoin de vous rappeler qu’au cours des dernières années, les Canadiens ont vécu une période d’inflation accrue, qu’il s’agisse du logement, de l’épicerie, de l’énergie ou d’autres biens de consommation, le coût de presque tout a augmenté. Mais il existe une exception remarquable : le prix des services de télécoms. »
Le prix des services Internet a diminué l’année dernière de près de huit pour cent, a ajouté Robert Ghiz, citant les chiffres de Statistique Canada, tandis que le coût des biens de consommation a augmenté de près de quatre pour cent. Il a souligné que la différence entre les prix des services cellulaires et l’inflation globale est encore plus dramatique, les prix des services cellulaires ayant diminué de plus de 17 pour cent au cours des 12 derniers mois.
Il a également mis en lumière un nouveau rapport de PwC commandé par l’ACT. Il détaille l’importance d’investissements continus et importants dans les réseaux au Canada.
« Comparativement à la plupart des autres pays, le Canada compte un mélange plus diversifié de fournisseurs de services nationaux et régionaux dotés d’installations qui se font concurrence pour attirer les clients non seulement sur le prix, mais également sur la qualité et la couverture », a soutenu M. Ghiz.
La poursuite des investissements dans le secteur des télécommunications, souligne le rapport, pourrait contribuer à hauteur de 112 milliards de dollars supplémentaires au PIB du Canada d’ici 2035, tout en réduisant davantage la fracture numérique.
Dans son annonce, Bell a fait valoir que l’expansion de son réseau au cours des quatre dernières années a permis d’offrir l’Internet haute vitesse par fibre optique à des centaines de communautés au Québec, en Ontario, dans le Canada atlantique et au Manitoba, mais que des millions de personnes ne sont toujours pas desservies.
La société a ajouté que son plan à court terme était de construire la fibre optique à haut débit dans 9 millions d’emplacements d’ici la fin de 2025. Ce projet, a déclaré Bell, sera reconsidéré et réduit à 8,3 millions d’emplacements.
Au moins 400 à 500 millions de dollars canadiens seront supprimés des dépenses en capital prévues par Bell pour 2024, a indiqué la société.
Adaptation et traduction française par Renaud Larue-Langlois.