On ne fait pratiquement plus de distinction aujourd’hui entre réseaux et communications, tellement il y a consensus autour du protocole IP. Depuis que la vidéo s’y retrouve aussi, les applications de téléprésence sont à l’aube de réaliser leur plein potentiel. Les organisations doivent apprivoiser dès maintenant cette nouvelle façon de communiquer.
Après plusieurs évolutions technologiques, aussi profondes que faramineuses, les télécommunications et les réseaux d’entreprise semblent avoir atteint une certaine stabilité. C’est principalement la vague déferlante des réseaux IP des dernières années qui a nivelé l’ensemble. Elle a fini par submerger presque tous les protocoles, les poussant dans l’ombre, dans l’oubli et dans leur remplacement.
Même si le RNIS (ISDN en anglais) continue de lutter, il semble bien que le tsunami IP soit irrémédiable. Par contre, cet état de fait a multiplié et bouleversé l’utilisation des télécommunications et des réseaux. La voix et les données y sont submergées, de plus en plus, par la transmission de vidéos. C’est une ère nouvelle d’applications technologiques corporatives qui voit le jour. C’est le cas du déploiement actuel de la téléprésence, qui est conforté par son soutien à la croissance de la performance corporative, à titre de solution à la nouvelle donne économique mondiale.
La bande passante
La bande passante est devenue assurément le carburant de l’exploitation de toutes ces nouvelles applications du début du vingt et unième siècle. La bande passante se paie et elle se paie cher, même si les prix diminuent avec la concurrence et l’augmentation exponentielle du volume d’utilisation. Pour toutes les nouvelles applications corporatives, le standard de fonctionnement est d’emblée à « large bande ». Les télécommunications et les réseaux en sont là et la bande passante n’est plus réellement un problème.
Améliorer la communication interpersonnelle
Albert Mehrabian, le professeur émérite à l’UCLA (Université de Californie à Los Angeles) est le père de la règle maintenant généralisée du « 7-38-55 ». Cette règle dit que 7 % d’une communication interpersonnelle passe par le langage verbal (la signification des mots), 38 % par les intonations de la voix et enfin que 55 % par le langage corporel.
Cela montre que la plus grande partie de la communication interpersonnelle passe par autre chose que le langage verbal. Elle passe donc par les intonations vocales, les instants de silence, les respirations, etc., mais aussi par tous les signes et les mimiques, tels que les hochements de tête, les clignements des yeux, les bâillements, les sourires et autres rictus, les grimaces faciales, le froncement des sourcils, les gestes de la main, le croisement des jambes, la position assise sur la chaise, la transpiration, la nervosité comportementale, les brèves exclamations, les hésitations, les tremblements, les sursauts, les redressements du torse, la rougeur des oreilles, le scintillement des yeux et du regard, etc.
Tous ces indices font partie de la discussion. Ils sont visibles et interprétés automatiquement par notre cerveau lors des conversations face à face. Toutefois, ils sont perdus et ne paraissent pas lors de conversations téléphoniques, de l’envoi de courriels, du clavardage et même en partie lors de vidéoconférence en raison d’un fonctionnement alterné. Par contre, la téléprésence offre actuellement l’alternative la plus réaliste à la présence physique dans un même lieu et à une conversation face à face. Son mode de fonctionnement, sa taille et sa résolution permettent une totale interprétation du langage corporel.
La vidéoconférence
La vidéoconférence, qui est l’application originelle de la téléprésence, a connu bien des stades dans son évolution. Lors d’une vidéoconférence c’est généralement un individu qui s’adresse à plusieurs autres par le biais d’un système. À l’autre bout, les participants sont souvent des spectateurs passifs, comme lors d’une conférence.
Cependant, contrairement à une conférence traditionnelle, les spectateurs sont géographiquement distants du conférencier. De plus, plusieurs salles de spectateurs peuvent suivre la transmission simultanément dans les lieux, en étant eux aussi distants les uns des autres. L’avantage de la vidéoconférence, dans ce cas, est justement de pouvoir rassembler tout ce monde facilement et rapidement, sans déplacement majeur, pour écouter un conférencier qui, lui non plus, n’aura pas à se déplacer. Il y a une économie majeure sur les déplacements, mais surtout une économie majeure sur le temps de travail perdu. Tout le monde sera de retour au bureau, quelques minutes après la conférence.
Les coûts assez faibles et les économies cumulées permettent de faire des vidéoconférences pour des sujets intéressants, bien que secondaires, pour lesquels l’organisation ne paierait jamais pour déplacer tout ce monde. La vidéoconférence peut également être utilisée de la même manière pour faire de la formation directe, des présentations ou des annonces à des clients, à des investisseurs, à des partenaires, etc. Évidemment, de la même manière, la vidéoconférence peut aussi avoir qu’un seul participant de chaque côté. Chacun participe tour à tour à la conférence – un peu comme on utilise des walkies-talkies – bien que les deux interlocuteurs se voient en permanence. C’est une sorte de half duplex alterné.
La téléprésence
La téléprésence, c’est toute autre chose. En étant beaucoup plus riche et naturelle, c’est comme si tous les participants étaient dans la même pièce, qu’ils soient nombreux ou qu’ils soient seulement deux. Bien que toutes les caractéristiques fonctionnelles de la vidéoconférence se retrouvent dans la téléprésence, la grande différence est que tout le monde voit et entend tout le monde, complètement, en permanence et en temps réel, si tous étaient dans la même pièce. C’est une sorte de full duplex permanent.
Lors de la téléprésence, les gestes les plus minimes peuvent être vus par tout le monde, d’un côté comme de l’autre. Les caméras saisissent tout et ne cachent rien. De même, les apartés seront entendus par tous, même s’ils sont discrets. Dans le cas de chuchotements, ces bruits de fond seront perceptibles par tous comme dans la vraie vie et leurs sources pourront être identifiées par tous.
Les outils de téléprésence, pour être efficaces et intéressants, doivent pouvoir montrer en permanence tout le monde avec une taille et une définition suffisante pour être réaliste, soit proche de l’échelle 1:1. La présentation typique de la téléprésence est celle d’une réunion où tout le monde est assis autour d’une grande table dans une salle de conférence. D’un côté de la table il y a les participants qui sont sur place et de l’autre côté il y a une série de moniteurs à haute résolution (qualité DVD : 480 p, ou qualité HD : 720 p) qui présentent l’image des participants distants dans leur taille réelle, pour plus de réalisme. L’arrangement inverse se trouvera dans l’autre salle de conférence distante. En permanence, tout le monde voit et entend tout le monde. Les règles de fonctionnement sont donc les mêmes que celles qui sont utilisées lors d’une réunion avec tous les participants dans le même lieu.
Les avantages
Les premiers avantages de la téléprésence sont les économies faites sur les déplacements et le temps de travail gagné en supprimant les déplacements. Il faut y ajouter aussi toute la fatigue physique et nerveuse épargnée. Un autre avantage est la facilité à disposer de tous les intervenants pour une même réunion avec téléprésence. Il est plus facile d’avoir tout le monde pour une heure que d’inscrire deux jours à l’agenda pour les déplacements. La participation de hauts dirigeants à des réunions diverses sera alors facilitée.
De même, la participation des experts de différents domaines d’une organisation sera plus facile à obtenir pour des réunions qui leur sembleront de moindre importance s’ils n’ont pas à se déplacer. La facilité d’organisation, les coûts abordables et la suppression des déplacements permettent d’organiser des réunions secondaires au niveau corporatif, mais de grande importance à leur niveau tactique ou opérationnel, qui autrement n’auraient jamais pu avoir lieu. Cela permettra la prise de décisions plus rapides et mieux éclairées. Cela permettra également de décupler la participation et l’influence des experts.
La multiplication des réunions par téléprésence entre des participants distants ou des filiales différentes, permettra de resserrer les liens au sein de l’organisation et d’unifier la culture d’entreprise. La téléprésence est un outil efficace d’intégration lors de fusions corporatives. C’est aussi un prodigieux outil de coordination et de planification avec les partenaires et les fournisseurs. La téléprésence pourrait aussi devenir un outil efficace dans la gestion de la relation client et de prospection commerciale. Enfin, pour un certain nombre d’employés qui doivent se déplacer beaucoup, la téléprésence permet de retrouver un certain équilibre entre les responsabilités corporatives et la vie privée (équilibre travail-famille).
Téléprésence et travail collaboratif
Outre toutes les utilisations de la téléprésence s’adressant à tous les genres de réunions, y compris pour la formation, et pour toutes autres relations interpersonnelles, une application spécifique semble d’ores et déjà empreinte de rentabilité : le travail collaboratif. En effet, la richesse du travail collaboratif est souvent proportionnelle à la qualité des individus qui se regroupent pour y participer, groupe de travail après groupe de travail.
Or, la téléprésence se prête particulièrement bien à ce type d’application. Elle permet de réunir des participants sélectionnés, quelles que soient leurs positions géographiques. Elle permet de recréer cette ambiance, parfois feutrée, parfois hilare, des salles de travail collaboratif. Les participants, généralement passionnés par le travail qu’ils font lors de ces réunions, oublient très rapidement qu’ils ne sont pas tous réellement présents physiquement, les uns près des autres. Les moniteurs vidéo prennent vie et les réunions de travail deviennent très vite des plus productives.
D’autant que le réseau de diffusion de la téléprésence permet également d’échanger en temps réel des documents, des graphiques, des plans ou des fichiers de tous genres. Une symbiose s’est manifestement établie entre le travail collaboratif et la téléprésence. Aussi, toute avancée de l’un provoque une avancée de l’autre. La téléprésence, par ses économies associées et sa souplesse, progresse actuellement dans les entreprises.
Le travail collaboratif est de plus en plus à la mode pour son efficacité et devient un standard. Cet état de fait est porteur pour le déploiement corporatif de la téléprésence, d’autant que les générations montantes ont d’autres valeurs et d’autres façons de travailler que celles de leurs prédécesseurs. Pour eux, le travail collaboratif est une seconde nature et le fait de passer à l’écran de la téléprésence ne les gêne plus depuis longtemps. Ils ont grandi avec Facebook, Twitter, MSN et autres.
La téléprésence sera au vingt et unième siècle ce que le téléphone et le courriel réunis ont apporté au vingtième sicle. D’autant que, si l’on s’y intéresse, la téléprésence participe activement à améliorer le bilan carbone des organisations qui l’utilisent. En effet, parmi tous les bénéfices, on retrouve une colossale économie en émission de CO2. C’est une technologie et une application particulièrement écologique et « verte ».
Pour vous en convaincre, imaginez comment vous pourriez utiliser la téléprésence dans votre organisation et allez sur le site de Tandberg (www.tandberg.com), un des leaders mondiaux avec Cisco (www.cisco.com/telepresence) de cette pratique, pour calculer l’impact écologique de cette approche, grâce à l’écolo-calculateur Web de Tandberg (www.seegreennow.com).
La téléprésence est assurément un outil qui semble là pour rester et bouleverser profondément les habitudes fonctionnelles des organisations. Sans doute ferions-nous bien de commencer à nous y habituer mentalement, avant de devoir nous faire « téléporter » en haute définition! Suis-je bien coiffé? Comment est ma cravate? Ai-je toutes mes photocopies?
Gérard Blanc est associé principal de GBA conseil, une firme conseil en gestion et en systèmes d’information.